Les interventions en séance

Budget
Nathalie Goulet 29/10/2012

«Projet de loi organique, relatif à la programmation et à la gouvernance des finances publiques»

Mme Nathalie Goulet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, membre de la commission des affaires étrangères, spécialiste du Golfe persique et du Caucase, je sollicite votre indulgence, n’étant pas une spécialiste des finances publiques. Néanmoins, depuis que j’ai été élue sénateur, je suis très attentive à la discussion des lois de finances, et M. le président Marini pourrait attester de mon assiduité. C’est donc avec un vif intérêt que j’ai pris des cours accélérés, la rigueur dans la gestion des finances publiques étant devenue une seconde nature dans le département de l’Orne, qui a à sa tête un ancien ministre délégué au budget, ancien président de la commission des finances du Sénat, père de la LOLF : je veux parler de notre excellent président Alain Lambert, désormais membre de la Cour des comptes. Ce département est, vous l’aurez compris, exemplaire ! Lorsque l’on parle de finances publiques, il s’agit non pas seulement des finances de l’État, mais bien des comptes de l’ensemble des « administrations publiques ». Pour l’avenir de notre monnaie, les finances publiques, au sens de la comptabilité nationale, ce sont les comptes de l’État, ceux de la sécurité sociale, des administrations de sécurité sociale, ainsi que ceux des collectivités territoriales et des administrations publiques locales. Monsieur le ministre, la fragilité du présent projet de loi organique résulte du caractère encore trop fragmenté de la programmation, de la gouvernance et de la gestion des finances publiques, qu’il est pourtant supposé renforcer. À l’heure de l’interdépendance, chaque année grandissante, des comptes publics et de la croissance du nombre des politiques partagées, cette fragmentation est aussi regrettable que dangereuse pour notre avenir. Comment pouvons-nous prétendre renforcer notre crédibilité auprès de nos partenaires européens et nous obliger à respecter durablement nos engagements si ce projet de loi organique n’embrasse pas l’ensemble des finances publiques au sens du périmètre de Maastricht ? Dans l’immédiat, la mise en œuvre d’une nécessaire vision d’ensemble de nos finances est freinée par la lettre de l’article 34 de la Constitution. Mais il reste indispensable de faire progresser la transparence financière, et le présent projet de loi peut tendre à cet objectif en nous permettant d’utiliser tous les instruments à notre disposition. Je pense, par exemple, aux annexes qui peuvent être ajoutées aux lois financières. À ce titre, il me semble insuffisant de nous contenter de prendre en compte les seuls soldes, sans décomposition en recettes et en dépenses. Par ailleurs, le manque de visibilité, lors du passage entre les différentes comptabilités budgétaires, générales et nationales, empêche le suivi régulier de l’exécution de nos comptes à l’aune du programme de stabilité. Plus grave encore, rien n’est réglé s’agissant de l’opacité – disons plutôt l’absence inacceptable de transparence – dans les relations financières entre l’État et les collectivités territoriales. De ce point de vue, l’émergence d’une loi de finances des collectivités territoriales aurait quelque mérite. Cette idée se heurte au principe d’autonomie, cher aux élus mais dont la portée est en pratique réduite à sa plus simple expression, tant la dépendance financière est grande. D’ailleurs, le défaut de l’un entraînerait immanquablement le défaut de l’autre Compte tenu de la fragmentation de la gouvernance, comment pourrions-nous souscrire à un régime de sanctions financières commun, sauf à ce que vous confirmiez, monsieur le ministre, la responsabilité financière solidaire et indéfinie des administrations publiques relevant du périmètre de Maastricht ? Si l’unicité de la gouvernance n’est pas renforcée, on pourra légitimement douter de la portée effective des dispositions du présent projet de loi organique. La programmation et la gouvernance des finances publiques ne seraient alors qu’une formule creuse figurant dans l’intitulé du texte, et si j’osais, me référant au titre d’une chronique du professeur Bouvier, cosignée par Alain Lambert, je vous dirais, monsieur le ministre : « La transparence, c’est maintenant ! » (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC.)