Les propositions de loi

Affaires sociales
Jean-Marie Vanlerenberghe 28/02/2013

«Proposition de loi autorisant l’expérimentation des maisons de naissance»

M. Jean-Marie Vanlerenberghe

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, notre groupe soutient dans son principe et dans ses modalités la proposition de loi de Mme Dini, dont je salue d’emblée la constance de l’engagement et l’excellence du travail. Le texte que nous examinons vise à expérimenter la création de maisons de naissance attenantes à des maternités. Il s’agit de réaliser une simple expérimentation, et non de graver quoi que ce soit dans le marbre. C’est même tout le contraire, puisque, par nature, une expérimentation est temporaire et se juge à l’aune de son bilan. En l’occurrence, le Gouvernement pourra autoriser la création de maisons de naissance, et les autorisations délivrées auront une durée maximale de cinq ans. Le texte prévoit que l’évaluation de l’expérimentation interviendra un an avant le terme de la dernière autorisation attribuée. Il est donc très explicite. Parce qu’il s’agit d’une simple expérimentation, son champ d’application sera extrêmement limité. Il est très important de le rappeler, le présent texte devrait aboutir à expérimenter au maximum une dizaine de nouvelles structures. L’expérimentation n’en sera pas moins utile. Elle répond en effet à la préoccupation bien réelle d’un certain nombre de parturientes, qui souhaitent accoucher dans des conditions moins médicalisées. Entre 3 % et 5 % des 800 000 femmes enceintes chaque année formuleraient le souhait d’un accouchement dit physiologique, c’est-à-dire d’un accompagnement de leur grossesse dans des conditions sanitaires satisfaisantes mais non invasives. Cette préoccupation est d’autant plus légitime qu’elle va dans le sens des intérêts de la collectivité. Disons-le clairement, d’un point de vue strictement financier et matériel, le développement de maisons de naissance est une pratique efficiente. En effet, le coût d’un accouchement par voie basse sans complication en maison de naissance est estimé à 600 ou 700 euros, contre environ 2 000 euros à l’hôpital. Le développement des maisons de naissance permettra de mieux répartir la prise en charge de l’accouchement et d’alléger le travail de l’équipe dédiée au plateau technique. Lors de l’examen du texte en commission, deux objections ont été formulées. Je ne mentionne la première que pour l’écarter rapidement : le texte ne répondrait pas au problème de la fermeture des petites maternités et l’aggraverait même, comme nous venons encore de l’entendre dire. Il n’y a aucun lien entre cette proposition de loi et la fermeture des petites maternités : traiter de cette problématique n’est pas son objet. Les maisons de naissance seront toutes attenantes à une maternité et ne pourront donc être ouvertes là où il n’y a pas ou plus de maternité. Un amendement de Gilbert Barbier prévoit même qu’il ne pourra y avoir de maison de naissance dans les endroits où il y a un risque de fermeture de la maternité. Les maisons de naissance élargiront tout simplement l’offre en proposant une solution d’accouchement alternative. Pour éviter tout risque de concurrence entre une maison de naissance et une petite maternité, le texte prévoit d’ailleurs explicitement que l’activité de la maison de naissance sera comptabilisée avec celle de la maternité à laquelle elle sera attenante. La seconde objection concerne la sécurité. Il s’agit évidemment de la préoccupation centrale, mais elle est très sérieusement prise en compte dans la proposition de loi. Celle-ci prévoit en effet deux garanties fondamentales. D’une part, la maison de naissance sera attenante à une maternité ; en cas de problème, les parturientes auront donc un accès immédiat au plateau technique. D’autre part, la maison de naissance devra conclure avec cette maternité une convention qui organisera les conditions de transfert des parturientes en cas de complication. A également été évoquée en commission la possibilité que la maison de naissance exerce son activité sous la responsabilité de la maternité. Les maisons de naissance ne seraient donc que de simples services des maternités. Le présent texte serait alors inutile à tous points de vue : juridiquement, il ne servirait à rien, et les maisons de naissance ne jouiraient plus de l’autonomie qui fait leur spécificité. Il reviendra donc à la convention d’assurer la parfaite sécurité du dispositif médical. De plus, le texte pose des garde-fous en amont et en aval du dispositif, puisque la liste des maisons de naissance autorisées sera arrêtée par le Gouvernement en fonction d’un cahier des charges établi par la Haute Autorité de santé et que l’autorisation de fonctionnement pourra être suspendue à tout moment par l’agence régionale de santé. J’ajoute que la prise en charge en maison de naissance peut même, par certains aspects, être considérée comme plus sûre que la prise en charge traditionnelle, dans la mesure où, comme le relève le rapport préparatoire au plan périnatalité 2005-2007, la surmédicalisation des grossesses peut être iatrogène. On le sait, la mortalité infantile et maternelle n’est pas fonction de tel ou tel modèle de prise en charge. La sécurité repose surtout sur la personnalisation du suivi. La technique ne pourra jamais se substituer à l’humain. Je terminerai en rappelant qu’il ne s’agit pas, avec cette proposition de loi, de faire un saut dans l’inconnu. Les maisons de naissance ne constituent pas une nouveauté. Elles existent, et sont même parfois la norme, dans de nombreux pays occidentaux, où elles fonctionnent parfaitement. En France, plusieurs projets pilotes, que Mme le rapporteur a cités, sont d’ores et déjà en place. Le présent texte leur assurera une certaine pérennité.  Parce que les accouchements ne peuvent être gérés comme des situations pathologiques, l’accouchement marquant – faut-il le rappeler ? – le début naturel de la vie, notre groupe souhaite, en accord avec Mme le rapporteur, encourager l’expérimentation des maisons de naissance. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC, de l’UMP et du groupe écologiste.)