Les interventions en séance

Economie et finances
Vincent Delahaye 25/07/2013

«Projet de loi relatif à la transparence de la vie publique-Article 1er»

M. Vincent Delahaye

Je ne voudrais pas allonger excessivement nos débats, alors que nous avons déjà fourni un travail important en première lecture, en commission comme en séance publique.
Je tiens toutefois à rappeler ma position sur cet article 1er, mais aussi sur l’ensemble de ce projet de loi, qui me semble n’être qu’un texte de circonstances inutile. Nous avons déjà trop de lois en France, et je ne me satisfais en rien de voir que nous en ajoutons encore qui ne servent à rien. On le sait, ce projet de loi découle de l’affaire Cahuzac, à la suite de laquelle le Gouvernement a cru bon et nécessaire de présenter un texte qui montre du doigt les parlementaires.
Il existe peut-être un certain antiparlementarisme dans le pays, mais je ne suis pas sûr qu’il soit de bonne méthode de montrer ainsi du doigt les représentants de la Nation. Je rappelle que les parlementaires, comme les maires des villes de plus de 30 000 habitants, dont je suis, déclarent déjà depuis longtemps leur patrimoine. Pour ma part, je me soumets à cette obligation, et je continuerai bien entendu de le faire. En réalité, cette affaire a surtout révélé une insuffisance du contrôle. Puisqu’il existe déjà une commission chargée de contrôler les déclarations, il y a un vraisemblablement une insuffisance à ce niveau-là. Nous devons remédier à ce problème. Toutefois, cette affaire est surtout l’histoire d’un parjure, et nous attendions donc un texte sur cette infraction.
Grâce au cumul des mandats, qui nous permet d’être régulièrement au contact de la population, nous nous apercevons que nos concitoyens sont choqués par ces mensonges répétés qui ne reçoivent pas de sanction. Or, au lieu de nous présenter un texte de cette nature, on nous propose de remplacer l’actuelle commission par une haute autorité. Pourquoi pas ? Toutefois, l’on nous propose aussi de renforcer cette instance, qui passerait de six à vingt membres. Il me semble que c’est beaucoup trop : six membres qui ont une bonne méthode de travail, cela suffit amplement. J’ai exercé dans le domaine du conseil et de l’audit avant d’être sénateur – je sais que l’on reviendra sur ces activités tout à l’heure –, et je serais très heureux de consacrer gracieusement une journée de mon temps à aider la commission à mieux organiser son travail. Au-delà de cette offre de services, je pense que l’on peut améliorer le fonctionnement de cette commission devenue haute autorité et qu’il n’est pas nécessaire d’augmenter le nombre de ses membres. Pour ce qui est de la publication des patrimoines, nous discutons d’un texte qui est celui non plus du Gouvernement, mais de l’Assemblée nationale, et dont tout le monde reconnaît qu’il est bancal. On va mettre à la disposition des citoyens des déclarations de patrimoine en préfecture, et ceux qui iront les consulter n’auront pas le droit d’en faire état. Je trouve ce dispositif pour le moins étrange : il encouragera effectivement les adeptes du voyeurisme, mais je ne vois pas en quoi il pourra renforcer la confiance de nos concitoyens envers leurs élus. Puisque l’on a toujours peur des médias et de l’opinion publique, on peut s’appuyer sur l’exemple des ministres. Bénéficient-ils d’une confiance supplémentaire de la part des Français et d’un accès de popularité depuis qu’ils ont publié leurs patrimoines ? Pour ma part, je ne m’en suis pas rendu compte... Il me semble donc que cette disposition n’est pas utile. Pour ce qui est des conflits d’intérêts, il faut répéter – la pédagogie est aussi l’art de la répétition – que, depuis de nombreuses années, aucune anomalie majeure n’a été relevée s’agissant des parlementaires, ni sur leurs déclarations de patrimoine ni en termes de conflits d’intérêts.
Il me semble donc que l’on devrait viser prioritairement les exécutifs, à l’échelon national comme au niveau local, ainsi que les cabinets ministériels. Contrairement à ce que certains de nos concitoyens peuvent penser, les parlementaires n’ont finalement que peu de pouvoirs ; ils donnent leur opinion sur les textes de loi, ils les votent, mais ils ne décident de rien.
On l’a vu à propos de la réserve parlementaire, qui est sans commune mesure avec celle dont disposent le Président de la République ou certains ministres. Il est donc sans intérêt de montrer ainsi du doigt les parlementaires. Dans De l’esprit des lois, Montesquieu écrivait que « les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires ». Il y a aujourd’hui beaucoup de textes qui seraient nécessaires pour relancer l’activité et créer des emplois en France ; en revanche, ce projet de loi ne sert à rien, et je voterai donc contre. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et de l’UMP.)