Les interventions en séance

Budget
Vincent Delahaye 25/07/2012

«Projet de loi de finances rectificative pour 2012-Article 2-Explication de vote »

M. Vincent Delahaye

L’an passé, les sénateurs centristes ont conduit dans cet hémicycle un débat sur le bilan de la défiscalisation des heures supplémentaires. Ce dispositif de défiscalisation devait à l’origine répondre à trois objectifs majeurs : contourner le blocage de la législation en vigueur relative à la durée hebdomadaire du travail, qui est inopérante dans certains secteurs d’activité ; accroître le pouvoir d’achat des salariés en valorisant les revenus du travail plutôt que les revenus de transfert ou de substitution ; dynamiser l’activité économique et favoriser à moyen terme la création d’emplois. La défiscalisation des heures supplémentaires a trouvé une vertu dans le contexte de la crise : elle a permis de sauver des emplois. Les entreprises ont pu, par ce dispositif, protéger leurs employés en ajustant leur masse salariale et répondre à leurs commandes alors que la conjoncture était désastreuse. En un mot, sans les heures supplémentaires, le choc de chômage que nous connaissons aujourd’hui se serait sans doute produit dès la fin de l’année 2009. Le coût pour nos finances publiques aurait alors été exorbitant. Ce constat a été établi par la DARES, par l’INSEE et également par l’ACOSS, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Les heures supplémentaires, c’est 528 000 entreprises, plus de 4 millions de salariés et 900 millions d’heures travaillées par an ! Pour vous, le contingent d’heures supplémentaires est substituable à un emploi. C’est votre vision de l’emploi ! Mieux vaut que tout le monde ait un emploi à 35 heures par semaine en étant rémunéré au SMIC que d’offrir la possibilité de travailler davantage pour agrémenter ses revenus. Or la question n’est plus d’arbitrer entre le droit aux loisirs et le droit au travail. Il s’agit aujourd’hui de protéger nos entreprises et leurs salariés au moment même où, comme le président Arthuis l’a rappelé à de nombreuses reprises, la fermeture de l’usine d’Aulnay agit comme un électrochoc. Mes chers collègues, nous sommes nombreux sur ces travées à avoir directement vécu le monde de l’entreprise. Et nous pouvons vous le dire, on n’embauche pas pour les mêmes raisons que l’on attribue des heures supplémentaires. Mais je crois que, au fond, vous le savez bien. Sinon, monsieur le ministre, pourquoi ne pas pousser votre raisonnement jusqu’au bout ? Si les heures supplémentaires sont parfaitement substituables à l’emploi, interdisez-les donc et la messe sera dite ! Les chiffres de l’INSEE nous montreront assez vite si vous avez fait fausse route. La réalité, c’est que vous cherchez surtout le rendement, mais vous n’aurez que la colère sociale en retour. Que direz-vous, mes chers collègues, à vos concitoyens lorsqu’ils viendront vous voir pour se plaindre de leur impossibilité de travailler davantage ? Croyez-vous qu’il suffira de leur dire que c’était une mesure de Nicolas Sarkozy et que leur peine devant leur fiche de paie s’effacera dès qu’ils verront leur nouveau collègue, si tant est que l’entreprise soit en mesure d’embaucher ? (M. Jean-Pierre Caffet s’exclame.) Pour notre part, nous, les sénateurs du groupe de l’Union centriste et républicaine, ne sommes pas prêts à prendre de tels risques et à jouer avec le revenu et l’activité de nos concitoyens. (M. David Assouline s’exclame.) Sans aucune mesure de protection des entreprises, sans aucune mesure en faveur de la compétitivité, sans aucune mesure pour diminuer la dépense publique – ce projet de loi de finances rectificative présente le grave inconvénient de ne proposer que des recettes supplémentaires et pas d’économies sur les dépenses –, nous ne pourrons cautionner une telle erreur de diagnostic. (M. Aymeri de Montesquiou applaudit.)