Les interventions en séance

Affaires sociales
Yves Détraigne 25/01/2011

«Proposition de loi relative à l՚assistance médicalisée pour mourir »

M. Yves Détraigne

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, j’avoue que, comme beaucoup d’entre vous sans doute, j’ai longtemps hésité sur la position à prendre dans ce débat. D’un côté, on ne peut pas être indifférent aux « appels au secours » que peuvent émettre des malades souffrant d’un mal qui provoque des douleurs insupportables et ne leur laisse aucun espoir d’amélioration. Leur vie est souvent un calvaire, et on ne peut que comprendre leur désir d’en finir. On se doit donc de répondre efficacement à leur souffrance. D’un autre côté, et quelles que soient les précautions dont on s’entoure pour s’assurer qu’elle est réclamée en toute connaissance de cause et qu’elle procure une mort sans souffrance, la décision d’aider une personne à mourir aboutit à commettre consciemment un acte qui donne la mort, et c’est pourquoi je pense qu’il n’appartient pas au législateur de franchir le pas. Comment, en effet, le législateur, qui, en 2007, a ajouté un article à la Constitution pour inscrire dans celle-ci que « nul ne peut être condamné à la peine de mort », s’interdisant ainsi de donner la mort aux criminels les plus abjects et les plus dangereux pour la société, pourrait-il accepter que l’on puisse donner la mort à un malade ? (Applaudissements sur plusieurs travées de l’UMP.) Il répondrait certainement à une attente, mais il ouvrirait surtout une terrible brèche.
Or je crois qu’il y a un principe absolu qui ne peut être transgressé, surtout dans une société en manque de repères comme la nôtre : nous ne pouvons pas inscrire dans la loi la possibilité pour l’homme d’ôter la vie à un autre homme. Ayant dit cela, je suis bien conscient que laisser un malade subir une torture inutile et dégradante n’est pas plus acceptable, surtout s’il a lui-même demandé qu’on y mette fin et qu’il n’y a plus d’espoir. C’est pour cela qu’il faut que nous nous donnions réellement les moyens de rendre applicable partout sur le territoire la loi Leonetti afin que les personnes malheureusement condamnées puissent mourir dans la dignité, sans souffrances inutiles et en bénéficiant vraiment des soins palliatifs indispensables. C’est comme cela, me semble-t-il, que notre société se grandira, sans renier un de ses principes fondateurs, le respect de la vie d’autrui, et en prenant réellement en compte les appels à l’aide de ceux qui souffrent et n’ont plus d’espoir. Cela signifie que je ne suis pas pour en rester à ce statu quo où 20 % seulement des gens qui ont besoin de soins palliatifs y ont accès. Je suis au contraire pour que cesse une certaine « bonne conscience » liée au vote de la loi Leonetti et pour que l’on se donne les moyens d’imposer la mise en œuvre des dispositions de celle-ci. C’est ce que nous attendons de vous, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et sur plusieurs travées de l’UMP.)