Les interventions en séance

Affaires étrangères et coopération
Christian Namy 24/01/2012

«Projet de loi fixant au 11 novembre la commémoration de tous les morts pour la France-Article 1er»

M. Christian Namy

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mon propos sera principalement consacré à l’article 1er du texte modifié par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat. Il portera sur trois points. Le premier concerne l’évolution de la définition du 11 novembre. En 1922, le Parlement en a fait le jour anniversaire de l’armistice de 1918, de la victoire et de la paix. En 2012, le Parlement souhaite y ajouter un hommage à tous les morts pour la France. Nous pourrions nous poser la question suivante : cette dualité annoncée risque-t-elle d’amoindrir la perception historique de la Grande Guerre ? Je ne le crois pas, car l’intérêt pour la Grande Guerre, que nous sentons reprendre de l’ampleur dans de nombreux secteurs de l’opinion publique, n’est pas uniquement centré sur la cérémonie du 11 novembre. La recherche historique sur la Grande Guerre connaît un formidable renouveau. La matérialisation du souvenir se diversifie de manière exceptionnelle. Permettez au président du conseil général de la Meuse, haut lieu de la guerre de « 14-18 », d’en témoigner. Il nous appartient cependant d’être vigilants, et je pense ici au rôle des élus locaux afin que le souvenir de 1914-1918 demeure au cœur des cérémonies du 11 novembre. Le deuxième point concerne ce que je dénommerai les risques de dégâts collatéraux de l’élargissement du 11 novembre. L’hommage rendu à tous les morts pour la France transformera-t-il le 11 novembre en un Memorial Day à la française ? La réponse est clairement négative pour tous les conflits qui bénéficient d’une journée commémorative : je pense à la Seconde Guerre mondiale et à la guerre de décolonisation. L’existence de ces journées commémoratives garantit la sauvegarde d’une mémoire combattante spécifique. La réponse est en revanche différente pour tous les conflits qui ne possèdent pas de journée commémorative, en particulier toutes les interventions françaises à l’étranger depuis la fin de la guerre d’Algérie. Pour ces interventions militaires, le 11 novembre deviendra la journée commémorative. Compte tenu de l’émiettement de ces interventions et, heureusement, du nombre comparativement plus faible de tués par rapport à ce qu’il fut lors des grands conflits mondiaux, l’idée de rassembler ces mémoires sur une date aussi forte que celle du 11 novembre est une bonne idée. Le troisième point, enfin, concerne le concept même de « Mort pour la France ». Ce concept est inscrit dans la loi. Mais connaissons-nous bien ce qu’il sous-tend ? La mention « Mort pour la France » a été créée en 1915. Elle ne s’applique donc pas aux conflits antérieurs à la Première Guerre mondiale. De plus, l’attribution de cette mention n’est pas automatique, mais dépend nécessairement de l’intervention de l’administration. Le ministère des anciens combattants en fut chargé pour les deux conflits mondiaux, le ministère de la défense en est aujourd’hui chargé pour les OPEX. J’appelle ici solennellement votre attention, monsieur le secrétaire d’État, sur l’impérieuse nécessité, pour ce ministère, d’étudier chacun des dossiers des combattants tués hors du sol français. En conclusion, je vous dirai simplement, mes chers collègues, mon soutien à cet article 1er du texte issu des travaux de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. (Applaudissements sur les travées de l’UCR et de l’UMP.)