Les interventions en séance

Affaires sociales
23/07/2014

«Projet de loi pour l՚égalité réelle entre les femmes et les hommes»

Mme Muguette Dini

Madame la ministre, le 11 juillet 2012, pour votre première séance au Sénat en tant que représentant du Gouvernement, nous avons travaillé ensemble sur le projet de loi relatif au harcèlement sexuel. Je suis donc heureuse de vous avoir en face de moi pour la dernière intervention de mon mandat de sénatrice. (Mme Nathalie Goulet s’en émeut.) J’en viens à ce projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes, en faveur duquel, vous le savez, j’ai voté lors des deux lectures dans notre hémicycle. Je ne reviendrai pas sur toutes les dispositions que j’ai approuvées, et sur lesquelles je me suis déjà longuement expliquée. En entendant Mme la rapporteur, je me suis dit que je l’avais échappé belle ; heureusement que je n’avais pas lu les recommandations du manuel de 1960, dont elle a fait mention il y a un instant : c’était l’année de mon mariage ! (Sourires.) Je voudrais néanmoins revenir sur quelques points du texte, et vous faire part, mes chers collègues, d’une satisfaction, de trois regrets et d’une inquiétude. La satisfaction, d’abord, c’est d’avoir pu faire prendre des dispositions spécifiques concernant le congé parental des parents de jumeaux et plus. Le premier regret a trait au maintien de l’adjectif « réelle » accolé au mot « égalité ». Comme pour le mot « laïcité », je considère que tout qualificatif appauvrit la notion.
Le deuxième regret concerne le maintien de la médiation dans le cas de la séparation d’un couple après des violences conjugales. Je ne développerai pas plus ce point, ayant eu l’occasion de le faire longuement auparavant.
Le troisième regret porte sur l’incapacité à imposer dans la haute fonction publique ce que les entreprises doivent, bon gré mal gré, mettre en œuvre pour assurer l’égalité dans leurs instances dirigeantes. Mon inquiétude, enfin, se rapporte à la difficulté qu’auront les parents à organiser la prestation partagée d’éducation de l’enfant. Néanmoins, globalement, ce texte constitue une grande avancée pour l’égalité femmes-hommes dans le champ professionnel, pour la protection des femmes seules, pour la protection des femmes victimes de violences, en particulier dans leur couple, et pour la parité. Le groupe UDI-UC sera donc majoritairement favorable aux conclusions de la commission mixte paritaire. Mais je voudrais profiter des quelques minutes dont je dispose à cette tribune pour évoquer devant vous, madame la ministre, mes chers collègues, quelques réflexions de fin de mandat. Je commencerai par l’égalité femmes-hommes. C’est non pas seulement dix ans de mandat sénatorial, mais toute une vie qui m’aura amené à constater que ce combat, car c’en est un, n’est jamais fini, jamais gagné. (Mme Gisèle Printz applaudit.) Il requiert un travail constant, une grande vigilance de la part des femmes, dont les plus jeunes, mais aussi des hommes, encore trop rares, qui sont absolument convaincus que le respect de l’égalité femmes-hommes est une chance pour notre démocratie et notre société. Je voudrais, ensuite, parler de notre travail de sénateur. J’exposerai à ce titre deux regrets. Nous sommes, d’abord, des élus expérimentés, avec une bonne connaissance du terrain et beaucoup de bon sens, mais nous ne sommes ni entendus ni écoutés. Les conseillers des ministres, jeunes et brillants, mais totalement déconnectés de la réalité, finissent toujours par avoir raison. Même si je fais une exception pour les membres de votre cabinet, madame la ministre, qui sont très à l’écoute, ce constat est globalement vrai. En dix ans de mandat, ensuite, je me suis rendue compte qu’on avait toujours tort d’avoir raison trop tôt, et que les suggestions faites à un moment donné et rejetées reviendront deux, cinq ou dix ans plus tard. Que de temps perdu et quel gâchis ! Pour conclure, c’est certainement un vœu pieux – il faut toujours espérer ! –, j’aimerais que soient enfin pris en compte par les gouvernements successifs les excellents rapports présentés, généralement, par deux sénateurs de sensibilité politique différente. Les textes de loi qui en découleraient pourraient sans doute recueillir, pour une meilleure efficacité auprès de nos concitoyens, une large majorité. Dans cette période de crise, il serait utile de voir ainsi adoptés un grand nombre de textes de consensus national, qu’une grande majorité de nos concitoyens réclament. Dans l’avenir, j’espère que vous pourrez, madame la ministre, mes chers collègues, contribuer à ce que cette « union nationale » se mette en place, avant d’y être contraints par une crise encore plus grande. Je vous remercie de votre attention et vous dis : au revoir ! (Vifs applaudissements.)