Les interventions en séance

Affaires sociales
Gérard Roche 22/07/2014

«PLFRSS»

M. Gérard Roche

Madame la présidente, madame « la » ministre (Mme la ministre sourit.), monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, comme vous le savez, nous avons été très déçus, et attristés, de la manière dont la discussion de ce texte s’est déroulée en première lecture.
Nous l’abordions sans dogmatisme ni a priori, avec un esprit d’ouverture dont nous espérions qu’il transcenderait les clivages politiciens. Notre Haute Assemblée avait notamment fait adopter le doublement de la réduction de cotisation par heure d’emploi à domicile déclaré. Nous étions très attachés à cet amendement parce que l’emploi à domicile est un secteur d’avenir qui doit être soutenu. Cet amendement avait en outre valeur symbolique. En effet, après la suppression des aménagements fiscaux dont jouissaient les particuliers employeurs, à savoir l’abattement de quinze points sur les cotisations patronales, supprimé le 1er janvier 2012, et le forfait, supprimé le 1er janvier 2013, et malgré l’instauration d’une réduction de cotisations de 75 centimes par heure déclarée, le nombre d’heures déclarées a baissé de 7 % en 2013, soit une perte d’au moins 16 000 équivalents temps plein, après une première baisse d’au moins 12 000 ETP en 2012. En deux ans, le nombre de particuliers employeurs a reculé de 3,2 % et le nombre d’heures déclarées a chuté de 6,1 %. Ce volet touche entre 30 000 et 40 000 personnes. Or, à chacune de ces mesures, nous avions tiré la sonnette d’alarme pour dire que toucher à ce régime fiscal menacerait l’emploi à domicile, à tout le moins l’emploi déclaré. Parce que, in fine, la perte d’emploi déclaré est une perte de cotisations, estimée à 120 millions d’euros par an. Nous ne pouvions donc que soutenir l’amendement de notre rapporteur général, Yves Daudigny, dont je salue au passage l’excellent travail et l’abnégation. Cet amendement a été adopté à l’unanimité du Sénat. Mais le Gouvernement, au lieu de respecter notre vote et ce consensus de bon sens, n’a rien trouvé de mieux que de nous demander de nous prononcer sur les recettes par un vote bloqué à l’occasion d’une seconde délibération, pour revenir à son texte initial ! Dans ces conditions, alors que nous avions l’intention de voter les recettes – monsieur le secrétaire d’État, vous nous aviez peu ou prou accusé de mensonge, la semaine dernière –, nous avons été contraints de nous y opposer. Le débat a ainsi tourné court.
Madame la ministre, puisque ce débat n’a pas eu lieu en première lecture, pourquoi aurait-il lieu davantage en nouvelle lecture ? Notre position sur ce texte est connue. Oui, nous étions prêts à voter la partie « recettes » du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale parce que nous soutenons les baisses de charges sur les bas salaires : baisses des charges salariales pour redonner du pouvoir d’achat et, surtout, baisses des charges patronales pour redynamiser la compétitivité de nos entreprises. Ce volet-là du pacte de responsabilité, nous ne pouvions que le soutenir. En revanche, vos options de financement restent pour le moins évasives. Le résultat, c’est un projet de loi de financement rectificative totalement déséquilibré. Face aux 9 milliards d’euros de manque à gagner pour la sécurité sociale en 2015, que nous proposez-vous ? Ils seront compensés ! C’est la seule certitude que nous ayons, puisque le code de la sécurité sociale l’impose.
Pour l’instant, la seule mesure concrète proposée par le Gouvernement dans le présent projet de loi est le gel des pensions de retraite à partir de 1 200 euros bruts, puis celui des allocations familiales en 2015.
Ces deux mesures ne devraient rapporter que 1,3 milliard d’euros. Elles ne sont donc pas en proportion des besoins. De plus, elles sont discutables sur le plan éthique, car il n’est pas juste de faire contribuer ainsi les plus modestes. Pour le reste, on évolue dans le flou le plus total. Le Gouvernement s’étant engagé à ne plus toucher à la fiscalité, le plan repose sur 50 milliards d’euros d’économies réalisées par l’ensemble des administrations publiques : 18 milliards d’euros pour l’État – on attend toujours des informations complémentaires pour pouvoir en juger – et 11 milliards d’euros pour les collectivités. Comment ? Cela, on le devine : avec une baisse des dotations globales de fonctionnement grâce à la réforme des collectivités territoriales.
Je ne reviens pas sur le reste à charge pour la sécurité sociale. La représentation nationale a droit à un peu plus d’information, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État. Nous ne pouvons pas accepter que vous entreteniez plus longtemps le flou sur vos options budgétaires pour ne pas avoir le courage de poser ouvertement la véritable question sur laquelle nous revenons sans cesse : celle de la fiscalisation, par la TVA ou la CSG, du financement de la protection sociale. Là est le problème de fond, selon moi. Dans ces conditions, et afin de ne pas perdre davantage de temps parlementaire, le groupe UDI-UC restera sur sa position initiale. Nous voterons la partie « recettes », d’autant plus que l’amendement phare de notre rapporteur général, Yves Daudigny, voté à l’unanimité par la Haute Assemblée, a été en partie repris – quelque peu modifié, mais l’essentiel est préservé – par l’Assemblée nationale. In fine, nous ne pouvons pas voter ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 devant autant d’imprécisions sur les économies à faire et en l’absence d’ouverture vers une fiscalisation partielle par la CSG et, surtout, par la TVA sociale. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et de l’UMP.)