Les interventions en séance

Droit et réglementations
Vincent Delahaye 19/12/2011

«Proposition de résolution tendant à modifier le règlement du Sénat afin de renforcer le pluralisme et l՚action du Sénat en matière de développement durable-Article 1er-Amendements 9,10, et 11 présentés par MM. Delahaye et Guerriau »

M. Vincent Delahaye

J’ai dit que cette proposition de résolution envoyait aux Français deux signaux négatifs : on leur donne le sentiment que l’intérêt des partis passe avant l’intérêt général (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV) et, quand le rassemblement devrait être notre priorité absolue pour faire face aux défis de l’heure, on introduit un facteur de division supplémentaire. Ne pouvez-vous pas, chers collègues Verts et socialistes, continuer de travailler ensemble ? Au sein du groupe de l’Union centriste et républicaine, des sénateurs issus de plusieurs partis politiques – Modem, Nouveau Centre, Parti radical, Alliance centriste, Gauche moderne – cohabitent sans difficulté. Chaque sensibilité a la possibilité de s’exprimer et chacun respecte l’autre : pourquoi ne serait-ce pas possible chez vous ? Ceux qui, à gauche, se félicitent de la modification de notre règlement pourraient un jour le regretter : faudra-t-il abaisser le seuil à huit ou six élus si les contingences politiciennes le réclament ? Doit-on se réjouir de cette nouvelle division à gauche ? À droite, j’entends certains qui s’en félicitent… Mais prenez garde, mes chers collègues, à l’effet boomerang ! Beaucoup regretteraient l’éparpillement, voire l’explosion, si les forces centrifuges devenaient incontrôlables ! Il y a une troisième raison pour laquelle cette proposition de résolution constitue un signal négatif : elle est d’ordre économique et financier. On ne peut pas, d’un côté, annoncer que l’on baisse les dépenses et, de l’autre, créer les conditions d’une augmentation des dépenses de fonctionnement ! Car cette modification du règlement va peser sur le fonctionnement du Sénat. Aujourd’hui conçue pour favoriser la création d’un nouveau groupe, cette mesure pourrait voir son coût rapidement augmenter… Je me suis engagé, au cours de ma campagne, à ne voter aucune dépense nouvelle non financée. Par quoi va-t-on compenser cette nouvelle dépense ? Comme toujours, par la baisse des dépenses d’investissement… Il en résultera une diminution des travaux et une baisse de l’entretien de notre patrimoine. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.) Cette politique ne correspond nullement au discours que nous tenons aux collectivités quand nous leur conseillons de réduire leurs dépenses de fonctionnement pour ne pas sacrifier leurs investissements. Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais… Quel mauvais exemple ! (M. le rapporteur s’exclame.) La suppression de travaux importants – on parle de plus de 500 000 euros, sans compter les indemnités à verser pour rupture de contrat – réduira l’activité des entreprises du bâtiment concernées, qui risquent ainsi de connaître des difficultés. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.) Il faut savoir que 500 000 euros de travaux supprimés, c’est l’équivalent de la paie annuelle d’une vingtaine de salariés du bâtiment ! Après cela, on peut toujours faire de beaux et grands discours sur la défense de l’emploi et la lutte contre le chômage… Mais nos actes ne correspondent pas à nos discours et nos compatriotes vont vite s’en apercevoir : la crédibilité des politiques en prendra encore un coup ! Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, je ne peux pas approuver cette proposition de résolution : elle privilégie la division au détriment du rassemblement, favorise la bureaucratie et les emplois improductifs aux dépens de l’économie et des emplois productifs et satisfait à des intérêts de partis, des intérêts du moment, plutôt qu’à l’intérêt général ! Certaines propositions ont valeur de symboles : celle qui nous est soumise ce soir est le symbole de ce que nous ne devrions surtout pas faire ! Il est encore temps de reculer. C’est pourquoi j’ai déposé ces trois amendements, dont je concède qu’ils relèvent de la dérision et de la provocation. Je l’ai fait parce que je ne peux absolument pas approuver l’abaissement à dix membres du seuil de création d’un groupe ! (Applaudissements sur les travées de l’UCR.)