Les interventions en séance

Affaires sociales
16/06/2011

«Projet de loi relatif aux soins psychiatriques»

Mme Anne-Marie Payet

Monsieur le président, madame le secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’issue de nos travaux, je tiens à formuler une observation de procédure concernant l’évolution du débat, laquelle peut sembler difficilement lisible à nos concitoyens. En première lecture, le texte transmis par l’Assemblée nationale a été largement modifié par la commission des affaires sociales. Mais ces modifications n’ont pas été retenues, et le texte final présente des incertitudes problématiques pour ceux qui auront à l’appliquer. Ce projet de loi s’articule autour de deux volets, la procédure médicale et le contrôle judiciaire. Le volet médical ne résout pas toutes les carences du système psychiatrique français, soulignées par un récent rapport de l’IGAS. Ces carences révèlent le caractère très complexe du sujet, et auraient nécessité une grande loi-cadre sur la santé mentale, d’ailleurs préconisée par la commission Couty, en 2008, puis par l’Office parlementaire d’évaluation des politiques de santé, en avril 2009. Le présent texte n’a pas cette envergure, le Gouvernement en est parfaitement conscient et vous l’avez clairement reconnu, madame la secrétaire d’État. Les questions clefs de la prévention, de l’accès aux soins et du traitement des détenus souffrant de troubles psychiatriques n’y sont pas abordées. Il nous faudra donc remettre l’ouvrage sur le métier. Toutefois, ce projet de loi a son importance, car il tente de résoudre le problème du suivi des soins avec cette notion, controversée, de « soins ambulatoires sans consentement ». Afin d’en donner une meilleure définition, le Sénat, sous l’impulsion d’Alain Milon, avait choisi de remplacer la notion de « formes de soins » par celle de « lieux de soins » et d’en dresser la typologie. De plus, nous avons substitué au « protocole de soins » le « programme de soins ». Tout en conservant le programme, nos collègues députés ont choisi de revenir à la summa divisio initiale entre hospitalisation complète et solutions alternatives. Cette rédaction n’emporte pas notre absolue conviction. Pour ce qui concerne le volet judiciaire, l’intervention du juge des libertés et de la détention, imposée par le Conseil constitutionnel concernant le maintien des mesures d’hospitalisation complète, constitue une amélioration sensible, car elle va dans le sens d’un plus grand respect et d’une meilleure protection des patients. Nous ne pouvons que saluer le travail effectué par la Haute Assemblée sur ce projet de loi qui, à n’en pas douter, porte la marque du Sénat. Enfin, à nos yeux, la première mouture de ce texte ménageait encore trop peu de pouvoirs au juge des libertés et de la détention. En première lecture, le Sénat a très judicieusement rééquilibré les pouvoirs de ce dernier, en lui permettant de se prononcer indirectement sur la possibilité de commuer une hospitalisation complète en soins alternatifs et en consacrant l’unification du contentieux en la matière. Notre assemblée a poursuivi ce travail d’amélioration en deuxième lecture, avec l’adoption de l’amendement du Gouvernement relatif à l’automaticité de la mainlevée de l’hospitalisation complète en cas de double avis médical concordant, conformément à la décision du Conseil constitutionnel en date du 9 juin 2011. Je salue à ce titre l’attitude constructive de la Chancellerie, qui s’est comportée selon la plus pure logique de la coproduction législative. En conclusion, malgré des lacunes et de potentielles incertitudes, le présent texte représente une avancée réelle en matière de soins psychiatriques. C’est pourquoi l’immense majorité des membres du groupe de l’Union centriste le votera.