Les interventions en séance

Collectivités territoriales
Hervé Maurey 14/03/2013

«Projet de loi, relatif à l՚élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers intercommunaux, et modifiant le calendrier électoral – 2ème lecture-Article 2-Explication de vote»

M. Hervé Maurey

Je ne voterai naturellement pas cet article, et vous n’en serez pas étonnés, mes chers collègues. J’ai été assez stupéfait que M. Kaltenbach ose dire que nos amendements étaient politiciens ! C’est vraiment le pyromane qui crie au feu ! (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste. – Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.) Vous soutenez un gouvernement qui se livre au pire tripatouillage électoral que l’on n’ait jamais connu dans l’histoire de la République ! (Nouvelles protestations sur les travées du groupe socialiste, qui couvrent la voix de l’orateur. – Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.) J’aimerais que l’on me dise ici quel autre gouvernement a changé tous les modes de scrutin en aussi peu de temps, invoquant chaque fois des règles différentes pour se justifier ? Aujourd’hui, vous nous dites qu’il faut éviter la proportionnelle, mais vous nous expliquerez bientôt qu’il faut l’introduire pour les élections législatives, la développer pour les élections sénatoriales et la maintenir pour les élections régionales ! Où est la logique ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Je n’en vois qu’une : vouloir à tout prix échapper à la sanction populaire et maintenir votre mainmise sur les collectivités et les institutions que vous dirigez ! De grâce, ne nous accusez pas de défendre des intérêts politiciens, car à cet égard, monsieur Kaltenbach, nous sommes vraiment tout petits devant vous ! Monsieur le ministre de l’intérieur, hier, vous avez déployé énormément d’énergie pour tenter de sauver l’article 2. Vous l’avez fait avec une argumentation qui m’a semblé très curieuse. Vous nous avez dit ceci, en l’espèce: il n’y a pas de majorité sur cet article, et la preuve en est qu’il a été rejeté en première lecture comme en commission des lois. Cependant, il faut le voter même s’il ne vous plaît pas : le Sénat étant la chambre des collectivités locales, il doit adopter cet article !  Mais, monsieur le ministre, nous ne sommes pas la chambre d’enregistrement des collectivités locales ! Nous sommes une chambre délibérative et nous n’avons pas à voter des articles qui ne nous plaisent pas ! Votre démarche aurait dû être tout autre. Vous trouvant devant l’assemblée qui représente les collectivités locales, vous auriez dû essayer de trouver avec elle un mode de scrutin qui lui convienne. Or ce n’est pas ce qui a été fait : les dix-neuf amendements visant à modifier le mode de scrutin ont tous été balayés d’un revers de main. Vous auriez pourtant pu trouver une solution : soit en accordant un peu de proportionnelle pour faire plaisir à vos alliés, et vous auriez alors trouvé une majorité avec eux, soit en faisant un pas dans notre direction en acceptant, au minimum, la proposition de M. Sido sur la création de sections au sein des cantons, afin de favoriser un ancrage territorial plus fort. Je suis d’ailleurs étonné que vous ne l’ayez pas fait, car je me souviens d’une époque où vous proposiez de maintenir les cantons en les regroupant dans des circonscriptions électorales afin d’assurer la parité. Cette solution nous aurait offert un type de scrutin moins mauvais que celui que vous nous proposez au final. Vous n’aurez concédé aucune avancée. Vous nous dites seulement qu’un effort pour faire passer le tunnel des plus ou moins 20 % vers plus ou moins 30 % serait envisageable, à condition toutefois de voter le mode de scrutin que vous nous proposez. Vous ne nous offrez cependant aucune assurance. Et je suis au regret de rappeler que nous avons déjà, par le passé, connu des marchés de dupes sur ces questions. Nous sommes donc très prudents. Quand je vous ai rappelé, hier, que nous avions été étonnés de voir que, après avoir soutenu le seuil de 1 000 dans le cadre du scrutin de liste, vous l’aviez laissé passer à 500 à l’Assemblée nationale, vous m’avez répondu : ce n’est pas moi, mais les députés ! Dès lors, quelles garanties avons-nous que l’effort que vous êtes prêt à consentir, dans votre grande bonté, sur le tunnel à plus ou moins 30 % sera effectivement maintenu à l’Assemblée nationale ? Enfin, hier, je vous ai posé des questions auxquelles vous n’avez pas répondu. Comme il s’agit certainement d’un oubli de votre part, je vais donc vous les rappeler. S’agissant du redécoupage, quelles garanties avons-nous quant à la prise en compte des cantons actuels ? S’agira-t-il, dans la mesure du possible, d’un regroupement de cantons existants ou bien fera-t-on table rase et repartira-t-on, à l’aveuglette, avec une paire de ciseaux ? Essaiera-t-on de prendre en compte les bassins de vie afin de permettre aux cantons de recouvrir une véritable réalité ? Tiendra-t-on compte, dans la mesure du possible, de l’intercommunalité ? Vous ne m’avez pas répondu sur tous ces points-là, pas plus que vous ne l’avez fait sur la question des conséquences de ce redécoupage sur plusieurs milliers de communes qui vont perdre leur qualité de chef-lieu de canton, avec tout ce que cela implique en termes de perte de dotation pour des collectivités déjà très éprouvées. Vous avez l’air de prendre cette question à la légère, monsieur le ministre, mais les finances des collectivités locales vont baisser pour la première fois, du fait de ce gouvernement. On peut comprendre que les communes perdant leur qualité de chef-lieu de canton souhaitent éviter une perte financière supplémentaire. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et de l’UMP.)