Les interventions en séance

Aménagement du territoire
Hervé Maurey 14/02/2012

«Proposition de loi visant à assurer l՚aménagement numérique du territoire co-présentée par M.Hervé Maurey-Article10»

M. Hervé Maurey, rapporteur de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire

Mon cher collègue, je suis un peu étonné de l’importance, peut-être excessive, que vous semblez attacher à cet article. En effet, vous l’avez vous-même déclaré, l’article 10 reprend les préconisations de l’Autorité de la concurrence. (MM. Yves Rome et Michel Teston manifestent leur approbation.) Il rappelle qu’une collectivité peut déployer ses réseaux sur l’ensemble de son territoire, en zone dense comme en zone non dense, et toucher des subventions, à condition naturellement que ces dernières ne portent que sur le déploiement concernant la partie non dense, et sous réserve que l’opération s’inscrive dans un SIEG. Au final, cet article ne faire que dire le droit ! À la limite, vous pourriez plutôt me reprocher d’avoir proposé une disposition inutile, qui n’apporte rien au droit existant ! Je rappelle d’ailleurs ce que j’ai dit tout à l’heure dans la discussion générale : initialement, le Programme national très haut débit, le PNTHD, autorisait le subventionnement du déploiement portant sur la partie non dense, même lorsqu’existait en parallèle un déploiement en zone dense. Curieusement, c’est lors d’une conférence de presse des ministres Éric Besson et Bruno Le Maire, le 27 avril 2011 – je me souviens de la date parce que j’ai vécu cet événement comme un recul du PNTHD –, que l’on a subitement mis un terme à cette situation, sans que l’on sache ni pourquoi ni sur quelles bases juridiques. On a alors menacé les collectivités qui oseraient commettre un « crime de lèse-opérateur » en déployant leurs réseaux dans des territoires déjà investis par les opérateurs d’une suppression de leurs subventions, y compris celles qui correspondent au déploiement sur la partie non dense. Je le répète, l’article 10 ne fait que confirmer l’avis de l’Autorité de la concurrence. Il rétablit le dispositif que le Gouvernement avait lui-même mis en place, avant de changer d’avis, au mois d’avril dernier, pour une raison inconnue ; M. le ministre s’en expliquera peut-être tout à l’heure. En revanche – je parle sous le contrôle des présidents de conseils généraux ici présents –, cet article répond à une attente très forte des collectivités qui souhaitent pouvoir déployer leurs réseaux sur la totalité de leur territoire, et non plus seulement là où il n’y a pas un centime à gagner et où les coûts sont élevés, de manière à arriver à une péréquation des tarifs. Ce dispositif leur permettrait de n’être plus obligées de laisser les zones un peu rentables aux seuls opérateurs, qui, comme d’habitude, écrèment le territoire pour n’en garder que les bonnes parties. Pour que les choses soient bien claires, j’ajoute que l’article 10 ne vise absolument pas à obliger les collectivités à déployer leurs réseaux sur tout le territoire ; il ne les y incite même pas. En revanche, il est vrai qu’il leur en donne la possibilité et qu’il leur fournit en quelque sorte une « arme » – ce mot me sera sans doute reproché – dans la négociation. En effet, je le répète, toute cette proposition de loi est fondée non pas sur une volonté de rupture, mais sur un souci de rééquilibrage entre des opérateurs aujourd’hui tout-puissants – je dirais même trop puissants – et des collectivités totalement soumises. À cet égard, une collectivité est un peu plus armée dans sa négociation avec les opérateurs quand elle peut les menacer de déployer ses réseaux sur l’ensemble du territoire ! Voilà pourquoi je suis très attaché à cet article 10, sans toutefois lui accorder l’importance que mon excellent collègue Retailleau veut lui donner. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)