Les interventions en séance

Collectivités territoriales
François Zocchetto 12/06/2013

«Projet de loi portant application de l՚article 11 de la Constitution-Deuxième lecture»

M. François Zocchetto

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 recélait probablement la plus grande innovation du précédent quinquennat. Il s’agit non pas des dispositions dont nous débattons cette après-midi, mais de la question prioritaire de constitutionnalité. À mes yeux, il s’agit d’une avancée essentielle, qui ne sera pas remise en cause de sitôt. Aujourd’hui, nous nous penchons sur la modification de l’article 11 de la Constitution. C’est évidemment avec satisfaction que, cinq ans après le vote à Versailles, nous voyons approcher le terme de la mise en œuvre de cette révision. Le principe du référendum d’initiative partagée avec le peuple a connu une lente gestation – c’est le moins que l’on puisse dire. Depuis les travaux du doyen Vedel jusqu’aux réflexions du comité Balladur, pour ne citer qu’eux, le processus fut très long. Ce n’est pas anormal : avant la Ve République, seuls les représentants du peuple étaient à l’origine de la loi. C’est bien une originalité de notre Constitution que d’avoir introduit la possibilité d’un véritable référendum, car je ne parle pas des plébiscites qui ont pu exister par le passé. Toutefois, il n’a échappé à personne que cette procédure est, jusqu’à présent, restée entre les mains de l’exécutif, soit dans le cadre de l’article 11, dont la mise en œuvre est laissée à la seule initiative du Président de la République, soit dans le cadre de l’article 89, qui prévoit certes une initiative partagée pour les révisions constitutionnelles mais qui nécessite l’accord de l’exécutif. C’est là le reflet du « parlementarisme rationalisé » dont on nous a enseigné les modes de fonctionnement. Certains des orateurs qui m’ont précédé l’ont souligné, ce système conduit à laisser les citoyens toujours passifs face à l’élaboration de la loi. Aussi, on ne peut que se féliciter de l’innovation adoptée en 2008 au sujet du référendum. En réalité, il ne s’agit pas d’un référendum d’initiative populaire, mais bien d’un référendum d’initiative parlementaire, appuyé par le soutien populaire. En pratique, cette procédure pourra, le cas échéant, être mise à la disposition des groupes minoritaires ou d’opposition, dans des cas de figure que l’on peine peut-être à concevoir aujourd’hui, mais qui peuvent se trouver. Par exemple, tel pourrait être le cas si la volonté du peuple était totalement ignorée par un exécutif s’obstinant à n’entendre ni le Parlement ni le peuple, lorsque ce dernier s’exprime par des moyens que d’aucuns peuvent regretter mais qui n’en existent pas moins, à savoir ceux de la rue. Chacun doute de l’applicabilité réelle de ce dispositif, dont la mise en œuvre est lourde et contraignante. En effet, elle exige d’emporter l’adhésion de 180 parlementaires, puis de recueillir 4,5 millions de signatures, de surmonter le contrôle de recevabilité du Conseil constitutionnel, et d’obtenir l’inscription du texte à l’ordre du jour du Parlement ou de faire en sorte que le Président de la République lance le référendum… Cela fait beaucoup d’étapes : on a donc du mal à imaginer les circonstances dans lesquelles cette nouvelle procédure pourra être utilisée. Ce référendum n’en aura pas moins le mérite d’exister juridiquement. Reconnaissons avec modestie les limites de nos capacités à concevoir de situations qui ne se sont jamais présentées, mais qui pourraient pourtant se trouver à l’avenir ! Aussi, notre groupe soutient cette démarche constitutionnelle. La grande majorité d’entre nous ont voté la révision du 23 juillet 2008. De même, nous voterons les présents textes, d’autant qu’ils ont été amendés dans le bon sens par la commission des lois. Son président, rapporteur du présent projet de loi organique, a accompli un travail très réfléchi et quasi consensuel : nous devons adopter ces projets de loi tels qu’ils nous sont présentés par la commission. Certes, le texte du projet de loi organique est différent de celui qu’ont produit les travaux de l’Assemblée nationale. Cependant, raccourcir de neuf mois à six mois le délai concédé au Parlement pour examiner le texte, supprimer le délai de quatre mois imparti au Président de la République pour lancer le référendum, autoriser également, de manière très pragmatique, l’expression des soutiens aussi bien par voie électronique que sur papier, sont des évolutions qui nous semblent aller dans le bon sens. Nathalie Goulet fera tout à l’heure une proposition d’amendement inspirée, comme sont souvent ses propositions (Sourires.), qui tend à étendre aux personnes physiques étrangères l’interdiction ou la limitation opposée au financement des campagnes référendaires par les personnes morales étrangères. Nous ne nous étions pas posé cette question, mais je crois qu’elle est judicieuse. Il ne faudra donc pas prendre cet amendement à la légère. En conclusion, nous voterons ces textes issus des travaux de la commission des lois et amendés. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et de l’UMP.- M. le rapporteur applaudit également.)