Les interventions en séance

Europe
Catherine Morin-Desailly 10/02/2011

«Projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques»

Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, si le projet de loi qui nous est présenté aujourd’hui contient essentiellement des dispositions à caractère social, il concerne la commission de la culture, de l’éducation et de la communication à plusieurs titres. D’abord, il complète la transposition de deux directives ayant une incidence sur deux professions qui nous intéressent.
L’article 7 du projet de loi vise ainsi à permettre aux architectes établis dans un État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen d’exercer leur profession en France en tant qu’associés d’une société d’architecture. Cette modification de la loi du 3 janvier 1977 sur l’architecture a aussi été introduite dans la proposition de loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit sur l’initiative de la commission de la culture, qui reste favorable à son adoption. La seconde directive dont il s’agit de compléter la transposition est celle du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles et qui concerne ici la profession de professeur de danse. Il s’agit d’autoriser les professeurs de danse ressortissants d’un autre État membre de l’Union européenne à exercer en France sans avoir à justifier de deux ans d’expérience professionnelle lorsqu’ils ont suivi une formation réglementée. C’est une simple mise en conformité du droit français et la commission ne voit pas, là non plus, de difficulté à l’adoption de cette mesure. Ensuite, le projet de loi habilite le Gouvernement à transposer par voie d’ordonnance le troisième paquet télécoms, les dispositions intégrées dans ces directives devant en effet être applicables en droit français avant le 25 mai 2011. Aussi étonnant que ce véhicule législatif puisse paraître, il paraît donc nécessaire de l’utiliser. Je tiens malgré tout à souligner qu’il s’agit de l’énième directive que l’on a tardé à transposer et que la pratique du Gouvernement est encore très largement perfectible en la matière.
Cette habilitation se justifie néanmoins, d’une part, parce que le paquet télécoms n’a pas été révolutionné mais simplement aménagé, et, d’autre part, parce que la marge de manœuvre laissée aux États membres est limitée. En outre, reconnaissons que le Gouvernement a adopté une démarche transparente sur la question, avec une consultation publique et la diffusion de l’avant-projet d’ordonnance.
Celui-ci modifie notamment l’article 42 du code des postes et des communications électroniques, le CPCE, afin de prévoir que l’ARCEP puisse prendre en compte pour l’assignation des fréquences dont elle a la responsabilité « la promotion de la diversité culturelle ou linguistique ainsi que, après avis conforme du Conseil supérieur de l’audiovisuel, le pluralisme des médias ». Je ne vois pas comment cette disposition pourrait être appliquée, mais, madame la secrétaire d’État, vous pourrez certainement nous donner des précisions à cet égard. En tout cas, nous pouvons nous réjouir que des objectifs culturels puissent être pris en compte par l’ARCEP dans le cadre de sa compétence d’attribution de fréquences. La commission de la culture, de l’éducation et de la communication sera néanmoins attentive, lors du dépôt du projet de loi de ratification, à ce que le texte contienne toujours la limitation de cette compétence de l’ARCEP aux fréquences dédiées aux télécommunications et l’avis conforme du Conseil supérieur de l’audiovisuel lorsqu’il s’agit d’assurer la réalisation de l’objectif de pluralisme des médias. Plus généralement, elle fera preuve de vigilance pour que les médias conservent une place de choix dans l’attribution globale des fréquences. Le projet d’ordonnance prévoit également une modification de l’article 34-2 de la loi du 30 septembre 1986, afin d’imposer de nouvelles obligations aux distributeurs de services audiovisuels au profit des personnes aveugles ou malvoyantes. Cette disposition a été déjà été adoptée au Sénat et, je le rappelle, la commission y était favorable.
Bref, la transposition du troisième paquet télécoms par l’article 11 ne pose pas de difficultés à la commission de la culture, qui a donné un avis favorable à son adoption. Toutefois, dans la mesure où la directive n° 2009/136/CE modifie la directive concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques, la commission a considéré que le présent projet de loi constituait aussi un vecteur intéressant pour faire passer des dispositions qui lui sont chères. Nous en reparlerons au cours de la discussion des articles. Par ailleurs, la commission de l’économie, par l’intermédiaire de son rapporteur pour avis, qui m’a associée à sa démarche – je l’en remercie –, a introduit dans le texte une disposition fixant dans le CPCE le principe de la neutralité du Net. Bruno Retailleau vient d’en donner la définition tout en rappelant l’enjeu d’une telle mesure. Notre assemblée s’est récemment penchée sur ces sujets : nos deux commissions et le groupe d’études Médias et nouvelles technologies ont en effet organisé une table ronde qui fournira un rapport utile à notre réflexion. Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, si le Sénat, comme c’est probable, adopte cet article, il se montrera à la fois réactif et innovant. La commission de la culture a donc été amenée à émettre un avis favorable à l’adoption du projet de loi, sous réserve du vote de son amendement portant article additionnel après l’article 14. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)