Les interventions en séance

Collectivités territoriales
09/11/2010

«Projet de loi de réforme des collectivités territoriales, conclusions de la Commission Mixte Paritaire»

M. Nicolas About

Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, plus d’une année après le dépôt sur le bureau du Sénat de quatre textes portant réforme des collectivités, nous examinons aujourd’hui les conclusions de la commission mixte paritaire, qui s’est réunie mercredi dernier, sur le projet de loi de réforme des collectivités territoriales. En octobre 2009, le Gouvernement s’était engagé à mettre en œuvre un calendrier de réforme en quatre temps ; cette méthode devait permettre de poser un à un les jalons d’une réforme dont la nécessité était reconnue ici par tous. Au lieu de s’y tenir, le Gouvernement a préféré céder à la pression de l’Assemblée nationale et prêter le flanc à des critiques légitimes. Les questions électorales devaient être débattues dans le cadre du projet de loi n° 61 relatif à l’élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale. Cédant face aux députés, le Gouvernement a bousculé ce calendrier, ce que nous regrettons. Sur un sujet si important, il eût été préférable de prendre le temps nécessaire à une meilleure concertation. La clarification des compétences devait faire l’objet d’un texte ultérieur. Sur ce sujet, également, nous regrettons que la parole donnée au Sénat n’ait pas été tenue. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.) Légitimement, on peut critiquer non seulement le calendrier, mais aussi la méthode par laquelle certaines dispositions ont été introduites dans ce texte à l’Assemblée nationale. Le Sénat a le sentiment justifié que son rôle de représentant constitutionnel des collectivités territoriales n’a pas été pleinement respecté. Nous le regrettons profondément. Je salue d’ailleurs la proposition de loi constitutionnelle de nos collègues du RDSE visant à donner le dernier mot au Sénat sur les projets de loi relatifs aux collectivités territoriales. Au-delà de cette initiative bienvenue, messieurs les ministres, monsieur le secrétaire d’État, nous vous demandons que, à l’avenir, la parole donnée au Sénat soit tenue et que les engagements pris devant nous soient respectés. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. –M. Jean Desessard applaudit.) Cela évitera que, comme aujourd’hui, l’adoption par le Sénat d’une réforme si nécessaire soit mise en péril. Car cette réforme, mes chers collègues, est nécessaire. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.) L’ensemble des sensibilités qui s’expriment au sein de notre groupe adhère, dans son principe, à la création du conseiller territorial. Comme l’indiquait voilà quelques mois le président du Mouvement démocrate, « il s’agit moins de diminuer le nombre de nos élus locaux que de mieux coordonner l’action des deux niveaux de collectivités. » S’agissant de l’élection des futurs conseillers territoriaux, en mars 2014, nous avons fait des propositions pour introduire une part de représentation proportionnelle, comme l’avait prévu aussi le Gouvernement. Après deux lectures devant la Haute Assemblée, nous avons fait le constat qu’il n’existait pas à ce jour, même si certains s’en revendiquent, une majorité pour adopter cette dose de proportionnelle. Nous l’acceptons. En revanche, nous comprenons mal l’attitude des dépités (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Jean Desessard applaudit.)... En fait, c’est nous qui sommes dépités ! (Sourires.) ...Je disais donc que nous comprenons mal l’attitude des députés s’agissant du seuil permettant le maintien au second tour des élections cantonales. Modifier les règles d’une élection quelques mois seulement avant sa tenue nous semble très malvenu et profondément contraire à notre tradition républicaine. Notre dernier sujet d’inquiétude relatif au conseiller territorial concernait le respect de la parité. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Soyez rassurés, mes chers collègues de l’opposition : sur ce point, notre membre titulaire de la commission mixte paritaire, Yves Détraigne, a obtenu une modification visant à rendre le dispositif d’incitation financière au respect de la parité plus pénalisant, et donc plus incitatif. (Vives exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) On parle du respect de la parité. Peut-être pouvez-vous déjà respecter la démocratie et le droit de parole des autres ? (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) Si vous souhaitez voir la parité respectée, respectez ceux qui s’expriment ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Jean-Pierre Michel s’exclame.) Notre dispositif consiste à appliquer à l’ensemble des départements d’une région la diminution de financement la plus importante atteinte dans un des départements de cette région, correspondant au plus grand écart observé entre le nombre de candidates et de candidats. Cela incitera les partis politiques à veiller au respect de la parité dans tous les départements, sans exception. Concernant l’intercommunalité, tant l’achèvement de la carte de l’intercommunalité que l’élection des délégués communautaires au suffrage direct doivent être salués. Il me semble d’ailleurs qu’on s’en félicite sur toutes les travées. Le travail du Sénat a été primordial sur ces sujets, tout particulièrement l’assouplissement des règles de répartition des délégués communautaires. La position de la Haute Assemblée a également été respectée sur les conditions de création d’une commune nouvelle. Enfin, concernant la clarification des compétences, les dispositions introduites par l’Assemblée nationale restent inabouties. Pour de nombreux membres de notre groupe, elles sont en deçà de ce que l’on pouvait attendre. Mais, en commission mixte paritaire, nous avons obtenu – j’en remercie encore une fois Yves Détraigne – que l’entrée en vigueur de ces dispositions soit reportée au 1er janvier 2015. Je considère que nous avons obtenu satisfaction, car, 2015, c’est loin... La majorité qui sortira des prochaines échéances électorales aura tout le temps et le loisir de modifier ces dispositions si cela lui apparaît nécessaire ou souhaitable. L’année 2015, c’est aussi après l’élection des premiers conseillers territoriaux. Ainsi, ce sont les élus qui siégeront à la fois à la région et au département qui élaboreront les schémas territoriaux d’organisation des compétences. Nous avons également renforcé la clause de revoyure qui permettra, par une nouvelle loi, de corriger et de compléter le dispositif dans l’année qui suivra sa mise en œuvre, soit en 2016. Le texte issu de la commission mixte paritaire enclenche un mouvement de clarification de la répartition des compétences entre chaque niveau de collectivités. Il enclenche le bon mouvement, dans la bonne direction. Grâce au report d’application que nous avons imposé, tous ceux qui souhaitent aller plus loin auront amplement le temps d’y revenir pour aller au-delà. En matière de cofinancements, la commission mixte paritaire nous a également permis d’obtenir des améliorations importantes. Tout d’abord, le seuil minimal de participation pour le maître d’ouvrage d’un projet est maintenu à 20 %, au lieu du seuil fixé à 30 % par l’Assemblée nationale. Ensuite, l’interdiction de bénéficier d’un cumul de subventions à défaut d’adoption dans la région du schéma d’organisation des compétences a été repoussée à 2015. Sur ce point, comme sur celui des communes nouvelles, l’Association des maires de France a indiqué que ses attentes étaient satisfaites. Mes chers collègues, cette avancée, mais, plus largement, tout le travail du Sénat, a été salué par les associations d’élus. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Il doit être préservé. Pour cela, il nous appartient de ne pas laisser le dernier mot à l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.) Lors de l’examen des conclusions de la mission temporaire sur l’organisation et l’évolution des collectivités territoriales, présidée par Claude Belot, nous soulignions par la voix de notre collègue Jacqueline Gourault, rapporteur, que la nécessité d’une réforme faisait consensus au Sénat. En séance, elle déclarait ceci : « L’intercommunalité a montré que les consciences évoluaient dans le temps. (M. Didier Guillaume s’exclame.) Je me souviens des réticences initiales – notre collègue Jean-Pierre Chevènement ne les a sans doute pas oubliées lui non plus – et l’intercommunalité a fait l’unanimité, même si cette réussite est encore susceptible d’améliorations. » En conclusion, notre collègue nous indiquait que, nous tous, en tant que sénateurs, nous étions prêts. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Aujourd’hui, après un an et demi de travail, de débats et de propositions, cela reste vrai : les sénateurs sont prêts ! (M. David Assouline s’exclame.) Nous sommes prêts à enclencher le mouvement de réforme, à préserver le travail et les améliorations obtenues au Sénat. C’est la raison pour laquelle une majorité de sénateurs de l’Union centriste voteront les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)