Les questions

Energie
Valérie Létard 31/01/2012

«Questions cribles thématiques sur l՚efficacité énergétique, notamment en matière de transport et de logement»

Mme Valérie Létard

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, dans le cadre du Grenelle de l’environnement, le Gouvernement a engagé, en janvier 2010, un plan de lutte contre la précarité énergétique pour aider les propriétaires occupants modestes à entreprendre des travaux de nature à améliorer la performance thermique de leurs logements. Cela a été fait dans un double but : faire baisser la facture d’énergie qui pèse lourdement dans le très faible budget de ces propriétaires – elle est, en moyenne, de 2 900 euros par an – et atteindre nos objectifs en matière de réduction d’émissions de gaz à effet de serre. Notons qu’il s’agit souvent de personnes âgées vivant en milieu rural dans des « passoires thermiques ». Le choix du parc privé ancien dégradé est pertinent, car on y trouve 95 % des logements classés en catégorie G, la catégorie la plus énergivore. Le programme « Habiter mieux », cofinancé par les crédits du Programme d’investissement d’avenir, le PIA, et l’Agence nationale de l’habitat, l’ANAH, a été conçu pour aider 300 000 propriétaires occupants qui, sans aides extérieures, n’ont aucun moyen d’avancer le coût de ces travaux. Ils doivent s’engager à atteindre un gain thermique de 25 %, ce qui suppose d’effectuer au moins 10 000 euros de travaux, lesquels sont couverts par des subventions pouvant aller jusqu’à 5 100 euros. On le constate, le montage de ces dossiers n’est pas si simple et les réalisations demeurent modestes : 6 800 logements rénovés au niveau national en 2011, contre 100 000 escomptés. Vous avez décidé, monsieur le secrétaire d’État, de revenir sur l’interdiction du cumul de ces aides avec l’éco-PTZ et de revaloriser l’aide de solidarité écologique aux travaux, en la portant de 1 100 euros à 1 600 euros, ce qui constitue malgré tout une belle avancée. Toutefois, l’augmentation du taux de la TVA, les difficultés pour accéder au crédit, la complexité du montage technique d’un dossier d’éco-PTZ et l’ingénierie des travaux constituent des freins importants à l’accès au dispositif proposé. Dans ces conditions, comment pouvez-vous et comptez-vous ajuster encore ce programme pour améliorer sa performance en le rendant vraiment accessible aux personnes très modestes auxquelles il est destiné ? Par ailleurs, envisagez-vous d’élargir les financements au parc privé ancien locatif pour lequel l’ANAH finance des réhabilitations uniquement sur des critères de dégradation et non pas sur des normes thermiques minimales ? En clair, est-il possible d’élargir ce dispositif aux propriétaires bailleurs ?

Réponse du ministre

M. Benoist Apparu, secrétaire d’État. Madame la sénatrice, vous connaissez bien ce projet puisque nous l’avons conçu et mis en place ensemble, alors que vous étiez membre du Gouvernement. Ce programme dépend, vous le savez, des investissements d’avenir. Dans le cadre du grand emprunt, d’un montant de 35 milliards d’euros, 1,35 milliard d’euros sont consacrés à la lutte contre la précarité énergétique. Sur cette somme, 500 millions d’euros proviennent du grand emprunt, 500 millions d’euros des fonds de l’ANAH, le solde étant financé par les grands énergéticiens au titre des certificats d’économie d’énergie. Ce programme est particulièrement intéressant dans la mesure où il permet de disposer de fonds privés émanant des énergéticiens afin de lutter contre la précarité énergétique. Si nous avons souhaité mettre en œuvre un tel programme, c’est parce qu’il nous paraît humainement et socialement beaucoup plus efficace non pas d’aider les personnes à payer leur facture, comme le proposent certains, mais plutôt de les aider à la faire baisser grâce à la réalisation de travaux d’économies d’énergie. C’est bon à la fois pour le secteur du BTP, parce qu’il y a des travaux, et pour la facture des personnes concernées, parce que son montant diminue. Ce programme fonctionne. Vous avez eu raison de le signaler, madame la sénatrice, il a été long à démarrer, et je vais vous en expliquer les raisons. Considérons les choses techniquement. Nous avons lancé ce programme au début de l’année 2011. Or celui-ci est financé en partie par les collectivités locales, notamment les conseils généraux. Pas de chance, nous étions alors en pleine période électorale. C’est pourquoi peu de projets ont été signés durant la première partie de l’année. Les engagements des départements ont quasiment tous été pris au mois de septembre. C’est à ce moment-là que le programme a véritablement pris son envol, et il produit maintenant les résultats escomptés. Enfin, vous m’avez demandé si j’envisage d’élargir le dispositif aux propriétaires bailleurs. À ce jour, nous n’avons pas l’intention de le faire, car il existe d’autres dispositifs pour ceux-ci.  

Réplique de Mme Valérie Létard

Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de m’avoir apporté des réponses sur le retard pris, en tout cas sur les raisons de ce retard à l’allumage ; je les entends. Toutefois, sur le terrain, si j’en juge par les remontées d’informations que j’ai en provenance d’associations qui s’investissent dans le champ du logement, un outil supplémentaire pourrait nous permettre de réduire le nombre de ces « passoires thermiques » que j’évoquais : ce serait l’élargissement des dispositifs de l’ANAH à des propriétaires bailleurs susceptibles, justement, de réduire la précarité énergétique de logements souvent loués à des familles elles-mêmes en grande précarité. Aussi, monsieur le secrétaire d’État, je vous demande simplement d’examiner cette proposition-là. Je suis consciente que, pour mettre en œuvre ce type de dispositif sur le terrain, il faut trouver les outils d’ingénierie et mobiliser non seulement les départements, mais aussi les collectivités et les communautés d’agglomération. En effet, trouver les moyens est une chose, mais accompagner les familles, aider à faire les diagnostics et trouver les équipes pour entreprendre les travaux, et les bons, en est une autre ! Vous avez raison, c’est compliqué, mais il faut néanmoins accompagner l’ingénierie et ouvrir le champ d’éligibilité de ce qui pourrait être un véritable outil au service des plus précaires !