Les questions

Affaires étrangères et coopération
Nathalie Goulet 10/11/2011

«Nathalie Goulet interpelle le Gouvernement sur l՚Iran»

Mme Nathalie Goulet

Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. Alain Juppé, ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes. Je n’ai aucune sympathie pour le régime iranien, mais franchement, j’en ai encore moins pour les menaces proférées par le Premier ministre israélien, parangon de vertu et défenseur d’un droit international qu’il bafoue régulièrement. L’État d’Israël possède l’arme atomique sans avoir jamais ratifié le traité de non-prolifération, contrairement à l’Iran qui, lui, l’a ratifié. L’Agence internationale de l’énergie atomique, l’AIEA, vient, c’est vrai, de rendre un rapport sur le dossier du nucléaire iranien qui fait état de doutes et de suspicions, les actes les plus répréhensibles datant de 2003. Les sanctions de plus en plus lourdes n’ont eu aucun effet sur le régime iranien ; plus grave, elles renforcent le régime en place et la cohésion nationale d’un peuple qui souffre de ces sanctions. L’Iran est le seul État-nation du golfe Persique ; toute attaque militaire renforcerait encore ce sentiment de fort nationalisme au détriment des mouvements politiques plus libéraux. La France a su faire entendre sa voix dans le dossier irakien et ne s’est pas laissé entraîner par les mensonges orchestrés par nos amis américains et les fables au sujet d’armes de destructions massives. (Exclamations sur les travées de l’UMP.) La France pourrait jouer un rôle déterminant et tenter de rétablir sinon la confiance du moins le dialogue, alors que le président des États-Unis en campagne électorale est paralysé par des lobbies puissants. Eh bien, vous soutenez les moudjahidines du peuple, c’est votre problème ! Le dossier du nucléaire n’est qu’un aspect de nos relations avec ce grand pays. Ma question est la suivante : monsieur le ministre, ne pensez-vous pas qu’il faille revoir notre politique à l’égard de l’Iran ? (Exclamations sur plusieurs travées de l’UMP.) Les sanctions n’ont pas fonctionné et retardent l’évolution démocratique de ce pays. Pensez-vous prendre une initiative diplomatique forte envers l’Iran pour tenter de rétablir, sinon la confiance, du moins le dialogue ?   Réponse du ministre M. Henri de Raincourt, ministre auprès du ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé de la coopération. Madame le sénateur, permettez-moi tout d’abord de vous présenter les excuses du ministre d’État, qui est actuellement en déplacement en Afrique du Sud. Mes propos, madame, seront plus mesurés que les vôtres. Depuis des années, en violation du traité de non-prolifération, en violation des résolutions de l’AIEA et de celles du Conseil de sécurité, l’Iran poursuit un programme nucléaire partiellement clandestin et qui porte sur des activités interdites de longue date, vous le savez. Avec nos partenaires européens, avec les États-Unis, la Russie, la Chine, avec le Conseil de sécurité, nous proposons à l’Iran une double approche : d’une part, le respect des demandes de l’AIEA et du Conseil de sécurité et, d’autre part, l’engagement d’un dialogue avec des offres de coopération extrêmement concrètes. Au début de cette année, les Six ont rencontré l’Iran à deux reprises, une fois à Genève, une fois à Istanbul. Le 21 octobre dernier, Mme Ashton a écrit aux autorités de ce pays pour confirmer cette volonté de dialogue. Il semble qu’à ce jour elle n’ait pas encore été honorée d’une réponse. De surcroît, dans l’une de ses dernières interventions, M. Ahmadinejad a annoncé une nouvelle augmentation des capacités nucléaires de l’Iran. Donc, comme vous l’avez dit vous-même, le rapport de l’AIEA est particulièrement inquiétant et montre que ce pays continue de refuser de répondre aux doutes de l’AIEA sur ses activités dans ces domaines extrêmement sensibles. Madame le sénateur, dans ces conditions, nous laissons bien sûr la porte ouverte au dialogue. Nous sommes toujours disposés à le faire mais, simultanément, nous n’avons pas d’autre choix que de demander une pression diplomatique accrue, par un renforcement des sanctions. Je ne porte pas le même jugement que vous sur l’effet de ces dernières. Je pourrais vous citer des pays dans lesquels elles ont permis d’obtenir des résultats extrêmement concrets. Faisons ensemble le vœu que le dialogue l’emporte sur la déraison ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur certaines travées de l’UCR.)