DANS LES MÉDIAS

LE MONDE : "Le budget de la politique de la ville n'échappera pas aux coupes"
Valérie Létard 29/07/2017

Le président de l'Association des maires Ville & banlieue estime qu'en abaissant les dotations, le gouvernement « joue avec le feu ».

Louise Couvelaire 
C'est une petite ligne parmi plus de soixante et elle est passée quasi inaperçue. Mais elle risque de créer une forte contestation. Le décret pris le 20 juillet, détaillant les réductions d'enveloppes des différents ministères, indique que le « programme 147 » de la politique de la ville sera amputé de 46,5 millions d'euros, soit plus de 11 % du budget total, s'élevant à 411 millions d'euros. Ce programme est le pendant « humain » du vaste chantier du « bâti », porté par le programme national de rénovation urbaine (PNRU). Il a pour objet de  « soutenir les politiques publiques engagées afin d'améliorer les conditions de vie des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville ».  Aujourd'hui, cette enveloppe concerne 435 contrats de ville, couvrant 1 514 quartiers parmi les plus pauvres de France, où habitent 5,5 millions de personnes. Et elle finance un grand nombre de dispositifs d'accompagnement : associations et centres sociaux oeuvrant pour la culture, le sport, les aides à la formation et au retour à l'emploi, l'éducation - écoles de la deuxième chance... -, la prévention de la délinquance et la tranquillité publique...  « Nous sommes tous conscients des contraintes budgétaires actuelles, mais cette annulation de crédits risque d'impacter toutes les actions mises en oeuvre dans le cadre des contrats de ville », tonne la sénatrice socialiste du Rhône Annie Guillemot, rapporteure - avec sa collègue (Union des démocrates et indépendants) du Nord Valérie Létard - du rapport d'information dressant le bilan de la loi Lamy, portant sur la politique de la ville.  « Efforts réduits à néant »  Présenté à la commission des affaires économiques du Sénat le 19 juillet, il conclut à une réforme  « bien engagée » mais  « fragilisée » par un  « manque de moyens ». « Le contrat de ville est le pilier humain de la politique de la ville, souligne Valérie Létard.  Sans cela, nous n'arriverons jamais à changer les quartiers. »  Cette coupe budgétaire est d'autant plus difficile à comprendre pour les acteurs de la politique de la ville que le président de la République et le ministre de la cohésion des territoires, Jacques Mézard, avaient confirmé ce mois-ci le doublement des crédits de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), pour les porter à 10 milliards d'euros.  « C'est un très mauvais calcul ! s'emporte Marc Vuillemot, président de l'Association des maires Ville & banlieue.  Sans actions d'accompagnement importantes sur le terrain, tous les efforts réalisés dans le cadre du PNRU seront réduits à néant. On le sait tous depuis longtemps. La régulation du climat social est essentielle. »  M. Mézard explique :  « Les annulations ont été orientées en priorité vers les crédits »  gelés « et pour lesquels aucun engagement n'avait été pris ou pour des dépenses du niveau national ». Certaines préfectures ont déjà reçu une lettre notifiant ces annulations et leur demandant de supprimer tous les dispositifs non encore engagés au 1er juillet.  « C'est non seulement inacceptable mais c'est aussi très dangereux,  martèle M. Vuillemot.  Cela peut créer des situations similaires à celles que l'on a connues en 2005. » Il n'est pas le seul à faire référence aux émeutes survenues cette année-là peu après la réduction de tous les budgets alloués au maintien du tissu social. Selon le président de Ville & banlieue, le pire est à craindre :  « L'objectif du gouvernement serait d'arriver, dès 2018, à amputer le budget de 100 millions d'euros, soit un quart du total. Ils jouent avec le feu ! »