DANS LES MÉDIAS

LE FIGARO : "Chronologie des médias : le Sénat entre en jeu"
Catherine Morin-Desailly 28/07/2017

Les élus donnent aux professionnels jusqu'à décembre pour trouver un accord. En cas d'échec, il y aura une loi.

Woitier, Chloé
CINÉMA C'est ce que l'on appelle un coup de pression. Alors que les négociations interprofessionnelles sur la réforme de la chronologie des médias vont d'échec en échec depuis des années, la commission culture du Sénat a décidé de poser un ultimatum. Exploitants de salles, producteurs, auteurs, opérateurs et groupes audiovisuels ont jusqu'à fin décembre pour s'entendre sur un nouvel accord. Dans le cas contraire, le Sénat se saisira lui-même du dossier pour proposer une loi courant 2018.  Pour le Sénat,  « le temps presse alors que les usages évoluent à grande vitesse »  et que les nouveaux entrants ne se soumettent pas aux règles du jeu du financement du cinéma français La polémique Netflix au dernier Festival de Cannes a rappelé  « la nécessité de réformer une réglementation devenue obsolète et inadaptée »  , souligne la sénatrice Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission.  Le 12 juillet, l'ensemble de la filière a été auditionné par la commission, à l'exception des plateformes américaines Netflix et Amazon qui ont décliné l'invitation. Les sénateurs ont tiré de ces discussions plusieurs pistes de réforme.  « Nous ne disons pas que nous avons la solution définitive. Mais c'est un moyen d'aiguillonner la réflexion »  , note le sénateur Jean-Pierre Leleux.  Contrepartie  Ces propositions ne veulent léser aucun acteur. Mais elles les invitent à des compromis. L'idée générale est de raccourcir les fenêtres de diffusion et d'éviter qu'une oeuvre de cinéma ne se retrouve indisponible légalement en ligne.  L'arrivée d'un film en VOD pourrait ainsi se faire trois mois après sa sortie en salle, contre quatre actuellement. Ce délai pourrait encore être raccourci pour les oeuvres ayant rapidement disparu des cinémas. Mais le Sénat refuse catégoriquement l'idée d'une sortie simultanée dans les cinémas et sur Internet. Les plateformes de VOD n'auraient par ailleurs plus l'obligation de suspendre la vente d'un film lorsque celui-ci passe à la télévision.  En contrepartie, la diffusion sur une chaîne payante passerait de 10 à 6 mois après la sortie cinéma. Cette dernière disposition est défendue par Canal +.  La fenêtre pour les plateformes de streaming par abonnement (SVOD), actuellement fixée à trois ans, serait réduite à condition que ces sociétés se plient aux obligations sur le financement de la création française. L'objectif est de favoriser les acteurs français déjà dans les clous et d'inciter Netflix à rentrer dans le rang. Le nouveau délai  « doit dépendre de la nature des engagements pris »  , estime le Sénat, qui ose une petite provocation. Selon lui, une plateforme de SVOD qui contribuerait autant qu'un Canal + au financement du cinéma français pourrait prétendre à la même fenêtre de diffusion, soit six mois au lieu de trois ans...  Les chaînes gratuites ne sont pas oubliées. Le Sénat est prêt à leur offrir ce qu'elles appellent de leurs voeux : la suppression des jours sans cinéma à la télévision (mercredi, vendredi, samedi), trois coupures publicitaires pour les films longs, la mutualisation de l'obligation de préfinancement du cinéma au niveau des groupes audiovisuels et non chaîne par chaîne... Sans ces concessions, les chaînes gratuites  « n'auraient pas intérêt à prêter leur concours à la réforme de la chronologie des médias »  , affirme le Sénat.