DANS LES MÉDIAS

LE FIGARO : "Face à la multiplication des rodéos à moto, les maires veulent plus de sévérité"
Vincent Delahaye 22/08/2017

Deux jeunes sont morts cet été. Le sénateur maire de Massy va déposer une proposition de loi à la rentrée.

Négroni, Angélique
 
SÉCURITÉ  Avec eux, les nuisances sont garanties à tous les étages. Dans la rue où ils risquent de renverser un passant, mais aussi chez les habitants des petites et grandes villes en circulant sous leurs fenêtres. Les figures acrobatiques qui ponctuent leur défilé étant réalisées dans un vacarme assourdissant.  « Une symphonie » , comme le décrit malicieusement un adepte de ces chevauchées (lire ci-dessous).  Partout en France, riverains et élus crient leur ras-le-bol face à ces rodéos de motos et de quads qui, en été, reprennent de plus bel sans que la police, selon eux, n'intervienne. Depuis la mort de deux jeunes à motocross percutés par une voiture de police en 2007, l'inaction policière serait, pour beaucoup, encouragée. Ce drame avait été à l'origine des émeutes de Villiers-le-Bel dans le Val-d'Oise. « L'interdiction donnée aux forces de l'ordre de poursuivre les contrevenants nous laisse, nous élus, désemparés sans solution » ,  tempête ainsi le sénateur maire de Massy (Essonne), Vincent Delahaye, dans un courrier adressé le 28 juin dernier au ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb. Pour attirer l'attention sur ce « fléau » urbain, ce dernier compte déposer à la rentrée une proposition de loi. En préparation, le texte viserait à durcir l'arsenal répressif. Outre la création d'un délit spécifique anti-rodéo qui sanctionnerait le propriétaire du deux-roues, il s'agirait aussi de détruire systématiquement la moto.  « Et pourquoi ne pas ajouter une majoration de prime d'assurance en peine complémentaire ? »  indique l'élu de l'Essonne. En 2015 déjà, plusieurs dizaines de sénateurs avaient tenté de faire adopter de nouvelles dispositions. Sans succès.  « Pourtant, il y a urgence à agir » , assène le même sénateur maire. Pas une région n'est aujourd'hui épargnée. Ainsi, dans le Nord, la métropole Lilloise doit fait face à des hordes de motos, tout comme à Nantes ou Belfort samedi dernier.  Le monde rural touché  Mais le rodéo n'est pas qu'un mal urbain. Il touche aussi le monde rural. Enfourchant quads et motos, des hors-la-loi sortent ainsi des cités qui ont poussé au milieu des champs et passent à travers les plaines en fauchant les récoltes. Ulcéré, Jacques Fouquenelle, agriculteur du Pas-de-Calais, avait fini par filmer ces bandes qui broyaient son maïs.  « Cela avait calmé le jeu »  , dit-il. Mais sitôt traqués à un endroit, ces motards font faire vrombir leur moteur ailleurs.  « On a l'impression que les forces de l'ordre préfèrent voir ces vandales au milieu de nos céréales plutôt qu'en ville »  , regrette Pierre Dacheville, autre agriculteur du département.  En ville, il est vrai, le danger est plus patent et les drames ne sont pas toujours évités. Ainsi, le 5 août dernier à Coignières dans les Yvelines, un adolescent de 13 ans a trouvé la mort en finissant sa course contre un arbre. Un autre jeune de 17 ans qui avait fui la police à Massy en mai dernier s'est tué en percutant un bus. L'enquête avait écarté la thèse de la course-poursuite, mais les esprits s'étaient aussitôt enflammés. Massy a essuyé deux nuits d'échauffourées. Le spectre de Villiers-le-Bel planait alors sur la ville.  Le dérapage, le drame et l'embrasement d'un quartier sont de toute évidence le scénario redouté par policiers et gendarmes. Beaucoup conviennent alors qu'ils ne visent pas forcément l'arrestation sur-le-champ et renoncent aux courses-poursuites, trop risquées.  « Par jeu, par peur et par provocation, les jeunes sont prêts à tout pour fuir la police. Ils mettent leur vie en danger et celle des autres »  , relate Claude Chabot, porte-parole de la Ligue contre la violence routière de Loire-Atlantique. D'autres moyens sont aujourd'hui préférés pour juguler ces pratiques. Touchée dans deux secteurs, Bordeaux a ainsi recours à la vidéo-verbalisation.  « Les images capturées sont adressées à la police, qui, par les plaques d'immatriculation, remonte jusqu'au propriétaire »  , raconte Jean-Louis David, l'adjoint en charge de la vie urbaine. Également, des actions d'envergure ont lieu. Des descentes dans des caves sont organisées pour contrôler les motos entreposées et leurs usagers.  « Les infractions pleuvent » , ajoute l'élu.  Ces opérations d'ampleur sont d'ailleurs privilégiées pour mettre un terme à des rodéos XXL. Ces « runs » qui déplacent des centaines de spectateurs dans des zones industrielles ou qui ont lieu aussi sur autoroute sont notamment traqués en région Occitanie.  « On contrôle tout le monde et on verbalise pour alcoolémie, engin trafiqué, excès de vitesse. Cela va de la contravention au délit » , relate un gendarme. Bordeaux, qui s'est doté il y a plusieurs années d'une piste d'accélération, est parvenu à attirer sur son circuit des adeptes de ces courses. Mais ceux qui utilisent la moto comme moyen de braver les interdits ne s'y rendent pas. La rue restera, pour eux, l'unique terrain de jeu.