DANS LES MÉDIAS

LE MONDE : "Deux sénateurs veulent accélérer la fin du monopole de la SNCF"
Hervé Maurey 08/09/2017

Une proposition de loi ouvrant à la concurrence le transport ferroviaire de voyageurs a été présentée mercredi 6 septembre

Éric Béziat
Qui allumera la première mèche du big bang ferroviaire français? Deux sénateurs s'y verraient bien jouer les premiers rôles. Hervé Maurey, sénateur UDI de l'Eure, et Louis Nègre, sénateur LR des Alpes-Maritimes, respectivement président et vice-président de la commission du développement durable de la haute assemblée, ont présenté, mercredi 6 septembre, la première proposition de loi mettant fin au monopole de la SNCF dans le transport ferroviaire de voyageurs à l'intérieur du territoire français.  Avec cette potentielle future loi relative à l'ouverture à la con­currence, les deux sénateurs ­souhaitent définir au plus tôt un cadre juridique. « Nous voulons éviter tout retard, tout recul ou tout renoncement qui compromettrait l'ouverture à la concurrence », affirme M. Maurey qui dit se méfier des atermoiements de l'administration des transports. « Finalement, dans cette affaire, on est plus macronistes que Macron », s'amuse M. Nègre, faisant allusion aux réformes radicales que le président de la République souhaite pour la SNCF et que Le Monde a rappelées mardi 6 septembre. Transfert des personnels  La proposition de loi est l'étape numéro un nécessaire à la mise en oeuvre du quatrième paquet ferroviaire européen, soutenu par la France et adopté en 2016. Cette directive européenne met fin au monopole d'Etat du transport national de voyageurs à compter du 3 décembre 2019 sur les lignes de service public dites conventionnées ­ (lignes régionales ou nationales non rentables), avec obligation d'une concurrence effective au plus tard en 2023. Pour les ­lignes commerciales non conventionnées (le TGV), les opé­rateurs alternatifs à la SNCF auront le droit de commercialiser des liaisons en 2021.  Mais, pour que tout ceci soit possible, il faut une loi, seule arme juridique à pouvoir mettre fin au monopole de la SNCF dans le transport ferroviaire intérieur de personnes, inscrit dans un texte datant de 1982. Place donc à la proposition Maurey-Nègre; un texte « équilibré, pragmatique, guidé par le souci de mettre le voyageur au coeur de notre démarche », soulignent les sénateurs, mais qui contient quelques bombinettes sociales susceptibles de mettre sur les nerfs les syndicats de cheminots.  Le sujet le plus sensible sera celui du transfert des personnels d'une ligne perdue par la SNCF au profit d'un opérateur privé. Les sénateurs, qui ont rencontré les organisations syndicales (à l'exception de la CGT, qui n'a pas répondu à leur invitation), se montrent mesurés.  Les personnes transférées conserveront leur statut, l'essentiel de leurs avantages, dont leurs fameux droits à la retraite (« sous réserve de l'évolution des régimes de retraite des agents de la SNCF »), et - les syndicats ont bien insisté là-dessus - leurs facilités de circulation.  A priori, pas de quoi provoquer de remous chez les syndicats. Sauf que ce transfert sera obligatoire pour les personnels de la ligne et si le nombre de volontaires est inférieur au périmètre de salariés requis pour l'exploitation, les récalcitrants ne pourront faire autrement que d'accepter le transfert. Qui plus est, organisation et horaires de travail seront définis par le nouvel employeur, source potentielle là encore de blocage.  Calendrier perturbé  « Les agents transférés seront protégés par les lois sociales françaises et la convention collective du secteur, rappellent MM. Maurey et Nègre. Nous ne sommes pas des libéraux échevelés. » Les sénateurs disent en donner la preuve avec leur proposition concernant la mise en concurrence des liaisons TGV.  A un classique système dit d' « open access », où, sur une même ligne, comme Paris-Lyon, le voyageur a le choix entre plusieurs transporteurs, les sénateurs préfèrent un système d'attribution de lots ou de franchises comprenant des liaisons rentables assorties d'obligation de service public sur des destinations moins rentables.  Reste à savoir ce qu'il adviendra de l'initiative de MM. Maurey et Nègre. Les sénateurs souhaitent que leur texte soit débattu avant la fin de l'année. Mais il risque de venir perturber le calendrier du gouvernement. « Notre priorité est de poser les bases des changements à venir dans le ferroviaire lors des Assises de la mobilité », souffle-t-on au ministère des transports. Pour le big bang, il faudra sûrement attendre 2018.