DANS LES MÉDIAS

La Voix du Nord :"Une cellule exceptionnelle pour l’emploi et les entreprises"
Valérie Létard 03/04/2013

Valérie Létard «Une cellule exceptionnelle pour l'emploi et les entreprises»

  Face à l'augmentation du nombre de demandeurs d'emplois (le taux de chômage a dépassé les 15%), la parole est aux présidents des deux communautés d'agglomération de l'arrondissement. Aujourd'hui, Valérie Létard, présidente de Valenciennes Métropole. Le taux de chômage s'élève à plus de 15% dans l'arrondissement. Votre première réaction?- «C'est conforme au contexte national et, chez nous, impacte forcément de façon importante: pour compliquer les choses, on a un tissu industriel important. Cela veut dire des réactions en chiffres, en positif ou en négatif, toujours accentuées par le fait qu'un tissu industriel est forcément sensible en période de crise. On sait très bien que, chez nous, on doit redoubler d'énergie dans ces périodes. C'est une réalité économique particulière.» Vigilance, et réaction: comment pouvez-vous réagir?- «Depuis des années, on est mobilisés. En tout cas pour l'Agglo que je préside, on a toujours eu en priorité numéro un une mobilisation très forte. C'est notre priorité, au travers de l'aménagement des zones d'activités, la requalification des friches industrielles, l'accompagnement des entreprises en difficulté. On a par exemple accompagné la reprise, par le groupe Agrati, d'Acument, société qui était en grande difficulté dans le Pays de Condé. On s'est battu aussi pour obtenir la Yaris hybride chez Toyota. À l'époque, on avait donné un million d'euros. Sur le technopôle, je rappelle qu'on a acquis les terrains, nous les avons dépollués. Nous portons et accompagnons les projets d'investissement immobilier d'entreprises et les aides à la création d'emplois. Depuis 2008, on a accentué cet effort. Le dernier projet que nous avons réussi à accueillir ici, c'est Oxylane, qui vise à créer 250 emplois. Là aussi, nous aménageons la zone, nous portons du foncier aménagé, avec des voiries d'accès. Ce sont des sommes constantes pour que notre territoire reste attractif, qu'on continue à créer des emplois, malgré la crise. Pourquoi créons-nous aujourd'hui un port à conteneurs avec la chambre de commerce? Pour qu'on puisse développer nos atouts et potentiels fluviaux afin de favoriser encore le développement d'activités de ce type. On développe quarante hectares sur le site historique de Toyota, qu'on est en train d'étendre aujourd'hui, parce qu'il y a là des atouts logistiques importants qui seront d'autant plus forts qu'on aura donné les infrastructures supplémentaires. C'est pour ça que je me suis battue pour l'échangeur A 2 - A 23: si nous n'avons pas une logistique facilitée par un accès ferroviaire, fluvial, autoroutier, c'est-à-dire la multimodalité amplifiée, nous nous coupons d'atouts alors qu'on est au carrefour de l'Europe du Nord. On n'est pas entrepreneur, on ne va résoudre les problèmes économiques, mais nous devons être des facilitateurs.» Le résultat n'est-il pas démotivant, malgré tous les efforts que vous détaillez?- «Nous sommes dans une période de crise qui ne fait pas monter les chiffres à la hauteur de ce qu'on espérait. On a quand même un solde positif et nous sommes pourvoyeurs d'emplois pour le reste du territoire au-delà de l'arrondissement. En même temps, nous avons une population de demandeurs d'emploi importante, qui est peut-être celle qui est la plus éloignée de l'emploi et qui nécessite qu'on ait un vrai travail dans l'accès à la reconversion professionnelle, à la formation. Ce que nous faisons: le PLIE de Valenciennes Métropole, sur mille personnes, en suivait 550 par an entre 2008 et 2010. Plus de personnes au PLIE veut dire plus de personnes en recherche de solution, qui sont demandeurs et volontaires. En 2012, on a remis 350 personnes sur le marché du travail, pour des contrats d'au moins six mois. Même si on est loin du compte, on retrouve quand même de l'activité. Les choix faits aujourd'hui sur le service à la personne, au niveau national, sur les réductions en terme d'avantages fiscaux, de réduction de charges, c'est dommage quand on sait que ce secteur d'activité, chez nous, est pourvoyeur d'emplois, ce sont des secteurs avec des niveaux accessibles. Si on monte les charges, les heures vont diminuer et le travail au noir va augmenter. Jean-Louis Borloo a défendu les services à la personne, c'est un secteur pourvoyeur d'emplois: ne vaut-il mieux pas payer des salaires et des charges amoindris, mais des salaires déclarés, des gens qui vont se qualifier, qui vont rendre un service dans le marché du travail, et non pas dans un marché parallèle? C'est autant de services sur lesquels on a ralenti notre capacité à générer de l'activité. Sur les dispositifs de l'emploi, il y a des réunions entre les services de l'État, nous y envoyons nos troupes. Ce qui serait bien, et que je vais proposer au sous-préfet, c'est ce que nous avions au plus fort de la crise financière de 2008. Comment renforcer l'accompagnement aux demandeurs d'emploi, avec Pôle Emploi particulièrement? C'est ce qu'on fait par exemple pour cibler quels sont les demandeurs d'emploi qui pourraient aller à Oxylane. Il faut avoir une cellule emploi, pas une grand-messe mais quelque chose d'opérationnel, mensuel, sous le pilotage du sous-préfet. Chaque agglo a ses outils, optimisons nos moyens! Nous, nous allons essayer d'avoir, pour les services à la personne, une plate-forme de l'offre à la formation qui, aujourd'hui, n'est pas recensée globalement. Ce n'est pas facile pour le demandeur d'emploi de savoir où s'orienter pour avoir la bonne formation. Pour les entreprises, en 2008, nous avions proposé au sous-préfet de l'époque de monter une cellule exceptionnelle qui nous avait permis de regrouper la Banque de France, la Directe [inspection du travail, NDLR], Pôle emploi, le médiateur du crédit..., pour aider les sociétés en difficulté qui avaient des problèmes de trésorerie. En 2012, les crédits aux entreprises ont baissé de 5%! Les banques, en cette période, doivent jouer ce rôle de relais face à des délais de paiement plus longs pour permettre aux entreprises de s'en sortir. Il y a aussi les emplois d'avenir, mais qui ont du mal à décoller. C'est simple: ils reposent sur des emplois publics et associatifs, mais c'est incitatif, les collectivités et les associations doivent seules se débrouiller pour créer ces emplois. C'est compliqué, avec les baisses de dotations. Et tout cela manque de visibilité. Enfin, le crédit impôt annoncé par le rapport Gallois, là aussi cela manque de visibilité, on ne sait pas comment ça marche, comment ça va fonctionner. Le rapport Gallois encourageait un choc de compétitivité en allégeant les charges des entreprises. Il y a eu aussi un débat sur la TVA, il y aurait peut-être fallu une TVA sur les produits d'importation, une sorte de taxe carbone, comme Jean-Louis Borloo l'avait proposé, une TVA en fait sur l'éloignement de la production: plus votre produit vient de loin, plus il est anti-développement durable. On a fait de la taxe sur le bâtiment et sur les travaux publics, sur des choses non-délocalisables! Il faudrait revoir la fiscalité dans notre pays. Nous, on se bouge, on met le paquet en terme de soutien d'investissement, d'aides à la création d'emplois, d'entreprises, on est attractifs, on fait un tram, on fait un stade, on se bat pour l'échanger, on fait un port, et des mesures nationales sont parfois dramatiques. Ce qu'on nous annonce avec Seine-Nord, c'est dramatique! C'était 4500 emplois immédiatement pour le Nord - Pas-de-Calais - Picardie, et un atout en développement industriel et touristique!» Seine-Nord c'est terminé?- «Si ce n'est pas terminé, c'est en tout cas reporté. À quand? Je n'en sais rien. Les choix qui sont faits aujourd'hui, en terme de grands projets structurants, c'est dommage d'attendre. Condé-Pommeruoeil aussi, on attend. On a fait notre boulot, les procédures sont prêtes, on attend que VNF et l'État signent, avec nos partenaires belges. Il ne faut pas perdre de temps pour ne pas perdre les fonds européens et qu'on puisse faire Condé-Pommeroeuil comme il se doit. Rien ne l'empêche aujourd'hui.» PROPOS RECUEILLIS PAR VINCENT TRIPIANA